# 7 / 2024
13.11.2024

L’initiative de résiliation II ne résout aucun problème, mais en crée toute une série

Assurer la prospérité et résoudre durablement les vrais problèmes

  • La croissance n’est pas un jeu à somme nulle. Lorsque la population d’un pays croît, on crée des emplois, des revenus, de la qualité de vie, de la liberté et des opportunités supplémentaires dont beaucoup bénéficient. Si la population suisse ne devait plus augmenter, il y aurait cependant des perdants. Un exemple: il est rentable à long terme de maintenir des liaisons de transports publics à condition qu’il y ait de la demande pour celles-ci.
  • Cela dit, il est également clair qu’il faut prendre au sérieux les préoccupations de la population à l’égard de l’immigration. Des mesures efficaces sont nécessaires pour résoudre les véritables problèmes liés à l’immigration et en même temps continuer à améliorer la qualité de vie dans une Suisse dont la population augmente.
  • Il faut par exemple continuer à accroître la productivité, mieux utiliser le potentiel de main-d’œuvre locale, mieux appliquer le droit d’asile, simplifier massivement les procédures entourant la construction de logements et mieux utiliser nos infrastructures et les développer de manière ciblée.

Forts de ces constats, nous vous présentons ci-après plusieurs solutions dans les domaines de la productivité et pour les politiques du marché du travail, de l’asile, du logement et des infrastructures:

La Suisse doit renforcer davantage sa productivité

La politique est appelée à prendre des mesures efficaces pour favoriser une croissance accrue de la productivité. Pour augmenter la productivité des entreprises et de la population active, la politique doit en outre créer les meilleures conditions-cadre économiques possible, alléger la réglementation et la bureaucratie, pousser la numérisation et ramener à un niveau durable la croissance disproportionnée, ces dernières années, des postes au sein de l’État. La Suisse doit notamment pouvoir saisir les opportunités offertes par les nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle (IA) générative (cf. article du 31 août 2024). Ainsi, les entreprises du secteur privé seront soulagées, la productivité augmentera et le besoin de main-d'œuvre étrangère diminuera.

La Suisse doit mieux utiliser le potentiel de main-d’œuvre locale

Dans son plan en huit points d’avril 2023, l’UPS a esquissé une série de mesures pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre croissante. economiesuisse soutient pleinement les demandes:

  • Le temps de travail effectif doit à nouveau être allongé.
  • Travailler davantage doit être financièrement intéressant.
  • Nous devons pouvoir travailler plus longtemps.
  • Nous devons valoriser la formation professionnelle.
  • Les décisions en matière de formation doivent être davantage fondées et réfléchies.
  • Nous devons laisser la porte ouverte à l’immigration de main-d’œuvre.
  • Nous devons permettre une organisation plus flexible des horaires de travail.
  • Nous devons maintenir davantage de personnes en situation de handicap sur le marché du travail.

Plus on travaille, plus longtemps et de manière productive, plus le besoin d'immigration de main-d'œuvre diminue (point 6 du plan de l'UPS). Il convient toutefois de préciser que le taux de participation des Suissesses et des Suisses au marché du travail est déjà très élevé en comparaison internationale, raison pour laquelle la Suisse restera tributaire de l’immigration de main-d’œuvre.

La Suisse doit appliquer de manière stricte la législation sur l’asile

En plus des défis existants, la politique migratoire actuelle est aussi marquée par des crises imprévisibles telles que la guerre en Ukraine. Dans ce contexte, economiesuisse s’engage en faveur d’une politique migratoire qui respecte la longue tradition humanitaire de la Suisse. Dans le domaine de l’asile, la Suisse ne doit accorder une protection qu’aux personnes qui y ont droit au sens de la législation sur l’asile et de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés. economiesuisse demande que les lois actuelles en matière de d’asile soient appliquées de manière stricte.

Protéger uniquement les personnes persécutées, pas les réfugiés économiques

Les personnes persécutées et à protéger doivent continuer à obtenir l’asile en Suisse. Cependant, les demandeurs d’asile qui fuient uniquement pour des motifs économiques ne doivent pas être autorisés à rester en Suisse. En guise de mesure d’accompagnement, il importe de revoir régulièrement les critères définissant les pays d’origine sûrs. Les ressortissants étrangers criminels doivent être renvoyés dans leur pays d’origine, dans le respect du droit international.

Prise en compte des évolutions en Europe

Il faut toutefois suivre attentivement les évolutions en Europe. Plusieurs États membres de l’UE durcissent actuellement leur législation en matière d’asile ou sa mise en œuvre. En adoptant le Pacte européen sur la migration et l’asile en mai 2024, l’UE a trouvé un accord sur une réforme globale du système européen de migration et d’asile, au terme d’années de négociations. Dans ces conditions et dans le contexte européen, la Suisse est tenue de s’engager en faveur d’une politique d’asile stricte, et de la mettre en œuvre sur son territoire. Sans cela, la Suisse risque de devenir un refuge pour une immigration incontrôlée.

Promouvoir les efforts déployés en vue des retours en collaborant régulièrement avec l’UE

La Suisse doit conclure d’autres accords de réadmission et renégocier constamment les accords existants. Il importe de renforcer la promotion des retours volontaires. À cet égard, une étroite collaboration avec l’UE est nécessaire, en particulier lorsque cela est utile à la Suisse. C’est le cas de la collaboration avec l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (FRONTEX) qu’il serait judicieux d’intensifier.

Égalité de traitement en ce qui concerne l’exécution des renvois

Tous les cantons doivent exécuter les décisions de renvoi, ceci afin de garantir l’égalité de traitement des demandeurs d’asile déboutés. Les cantons qui ne souhaitent pas exécuter de telles décisions doivent en supporter toutes les conséquences financières.

Améliorer l’intégration de réfugiés reconnus sur le marché du travail

Pour commencer, il faut établir au plus vite, grâce à des procédures d’asile accélérées, quelles personnes remplissent les critères pour obtenir le statut de réfugié selon la loi suisse sur l’asile. Des mesures ciblées sont ensuite nécessaires pour accroître l’employabilité des réfugiés reconnus. Dans ce contexte, il convient de mentionner les efforts déployés par la Confédération et les cantons pour prolonger des programmes linguistiques existants et les améliorer progressivement. Le programme de «préapprentissage d’intégration» (PAI), qui prépare les participants à suivre un apprentissage professionnel, mérite aussi d’être salué. Des compétences linguistiques suffisantes sont en effet la clé d’une intégration réussie.

Selon economiesuisse, la politique d’asile suisse doit s’appuyer sur ces fondements. L'élaboration de mesures concrètes relève de la responsabilité du Conseil fédéral et du Parlement.

La Suisse doit rapidement construire davantage de logements pour la population

Dans l’ensemble, la Suisse compte encore suffisamment de logements. Des mesures s’imposent toutefois dans les zones résidentielles urbaines les plus demandées. L’offre de logements y est faible.

La pénurie de logements actuelle dans les agglomérations a de multiples causes.

Attribuer la hausse de la demande de logements à la seule croissance démographique est simpliste. De multiples facteurs influencent la demande de logements:

  • L’augmentation des revenus des ménages entraîne une hausse de la demande de logements. Selon l'Office fédéral de la statistique, la surface habitable moyenne par habitant dans les immeubles collectifs est passée de 38,7 m2 en 1970 à 46,8 m2 en 2022.
  • La taille des ménages décroît: La tendance est à la diminution du nombre de personnes vivant sous le même toit. Le nombre moyen de personnes par logement est passé de 2,9 personnes par logement en 1970 à 2,2 personnes en 2021. Dans ces conditions, il faut davantage de logements pour le même nombre d’habitants.
  • Baisse des activités de construction: La forte demande de logements dans les centres ne peut pas être satisfaite, car il est de plus en plus difficile de construire. Selon Wüest Partner, seuls 42 050 nouveaux logements ont été construits en 2024 en Suisse. C’est le volume le plus bas depuis 2003. Surtout, des prescriptions compliquées, des procédures excessivement longues et un trop grand nombre d’oppositions empêchent d’y remédier. Il y aurait amplement de capital disponible pour créer davantage de logements.
  • Des procédures d’autorisation difficiles et longues: La Banque Cantonale de Zurich a établi qu’en Suisse il faut 140 jours en moyenne pour qu’une demande relative à une autorisation de construire soit approuvée. Dans les centres, où la situation est le plus tendue, les délais sont encore nettement plus longs. Ainsi, il faut 330 jours en ville de Zurich et même 500 jours à Genève. Dans toute la Suisse, les procédures se sont allongées de quelque 67% en moyenne par rapport à 2010.

Les solutions pour désamorcer la situation en matière de construction de logements sont connues depuis longtemps. economiesuisse demande que l’on construise davantage et plus vite en Suisse (cf. article du 17 mai 2023). L’organisation préconise en outre de simplifier les procédures d’autorisation (cf. article du 27 septembre 2023).

La Suisse doit d’urgence éliminer les goulets d’étranglement dans le domaine des infrastructures

L’utilisation des infrastructures en Suisse est fortement corrélée à la prospérité et non à la croissance démographique. L’utilisation de la mobilité en tant que bien de consommation est donc principalement liée au revenu. Plus le revenu du ménage est élevé, plus les distances journalières moyennes parcourues par ses membres sont longues (cf. microrecensement mobilité et transports). Les problèmes ci-après en lien avec les infrastructures doivent enfin être abordés:

  • Le réseau routier suisse est chroniquement surchargé: Pour 2023, l’Office fédéral des routes a annoncé des chiffres records pour les véhicules-kilomètres parcourus et les heures d’embouteillage sur les autoroutes. Les Suissesses et les Suisses ont en effet passé quelque 48 000 heures dans des embouteillages cette année-là.
  • Les points névralgiques sont particulièrement touchés: Près de 90% de ces heures d’embouteillage sont dues à une surcharge de trafic et concernent des points névralgiques sur le pourtour des agglomérations. Le système y atteint ses limites – même une faible augmentation du trafic conduit à toujours plus d’immobilisations. Cela génère des problèmes sur le réseau routier secondaire, dans les centres-villes par exemple.
  • Certains investissements auraient dû être réalisés il y a longtemps: En Suisse, le trafic a augmenté nettement davantage que la surface des routes ces dernières décennies. Le rail ne peut pas répondre seul à la demande supplémentaire de mobilité – les personnes et les marchandises sont tributaires de la mobilité individuelle.
  • Les routes nationales, un élément ultra-performant du système de transport suisse, sont négligées: Selon les chiffres les plus récents de la Confédération, elles ont assuré 45% du trafic routier en 2023, alors qu’elles représentent 3% à peine de l’ensemble du réseau routier.

Aussi economiesuisse soutient-elle la sécurisation des routes nationales, soumise en votation en novembre 2024. L’étape d’aménagement 2023, avec ses six projets ciblés sur des points névralgiques, élimine des goulets d’étranglement et améliore la fluidité du trafic sur les routes nationales. Ce faisant, elle apporte une contribution importante à des transports plus propres, plus sûrs et plus fiables.

Les infrastructures existantes recèlent encore un grand potentiel d’efficacité:

  • Mieux utiliser le transport individuel motorisé (actuellement 1,6 personne par véhicule en moyenne, voire 1,1 seulement aux heures de pointe).
  • Mieux utiliser les transports publics (actuellement, le taux d’occupation des trains CFF sur l’ensemble de la journée est inférieur à 30%).
  • Améliorer la gestion du trafic (à l’heure actuelle, on n’utilise presque aucun système intelligent d’optimisation et d’utilisation).
  • Mettre en relation et en réseau (les sociétés et les moyens de transport fonctionnent en silo).
  • Développer les infrastructures (l’entretien, l’aménagement et la transformation sont trop complexes et prennent trop de temps).