Ses­sion spé­ciale du Conseil natio­nal 2020

Afin de réduire le nombre de ses dos­siers en cours, le Conseil natio­nal se réunit en ses­sion spé­ciale les 29 et 30 octobre 2020. Les déci­sions rela­tives aux «pro­jets Covid-19», tels que ceux rela­tifs aux loyers com­mer­ciaux, aux cau­tion­ne­ments soli­daires ainsi que ceux visant à assou­plir le frein à l’en­det­te­ment, sont impor­tants pour eco­no­mie­suisse. L’éco­no­mie est oppo­sée à toute atteinte aux droits fon­da­men­taux et à la liberté éco­no­mique, ainsi qu’à toute dis­tan­cia­tion des modèles de poli­tique finan­cière aux­quels la Suisse doit sa pros­pé­rité.

Vue d'en­semble de la ses­sion

Ce qui pré­cède vaut pour la loi Covid-19 sur les loyers com­mer­ciaux et pour celle sur les cau­tion­ne­ments soli­daires. Le Conseil natio­nal est entré en matière sur la pre­mière alors même qu’elle demande des inter­ven­tions dis­pro­por­tion­nées dans des droits fon­da­men­taux garan­tis par la Consti­tu­tion. Il faut espé­rer que sa com­mis­sion cor­ri­gera le tir lors des déli­bé­ra­tions détaillées. Le Conseil natio­nal a adopté la deuxième loi avec trois modi­fi­ca­tions impor­tantes par rap­port au Conseil des États. La Chambre basse sou­haite des délais de rem­bour­se­ment plus longs pour les cré­dits et un taux d’in­té­rêt zéro sur toute la durée. La majo­rité n’a pas entendu l’aver­tis­se­ment du conseiller fédé­ral Ueli Mau­rer selon lequel 135 000 contrats devraient être réécrits en cas d’al­lon­ge­ment du délai de rem­bour­se­ment et que cela por­te­rait atteinte à la sécu­rité juri­dique. Du point de vue d’eco­no­mie­suisse, la déci­sion selon laquelle les entre­prises qui demandent un cré­dit Covid ne sont pas auto­ri­sées à déci­der le ver­se­ment de divi­dendes et de tan­tièmes pen­dant la durée du cré­dit est incom­pré­hen­sible. Cela dit, il est jus­ti­fié qu’elles ne puissent pas les ver­ser pen­dant cette période. C’est main­te­nant au Conseil des États de se pro­non­cer. Nous espé­rons qu’il s’en tien­dra à sa déci­sion ini­tiale.

La motion deman­dant que les dépenses extra­or­di­naires pour lut­ter contre la pan­dé­mie de coro­na­vi­rus ne soit pas comp­ta­bi­li­sées dans le compte d’amor­tis­se­ment mais comme des «dettes publiques» a été reti­rée du pro­gramme de la ses­sion.

Enfin, lors du vote final, le Conseil natio­nal a fait échouer le pro­jet de loi sur un nou­veau règle­ment régis­sant l’accès des acteurs civils au bâti­ment du Par­le­ment. Dans les grandes lignes, la situa­tion reste inchan­gée.

Les loca­taires de biens com­mer­ciaux ne doivent payer que 40% du loyer pour la période de fer­me­ture for­cée ou de res­tric­tions strictes au prin­temps en lien avec la crise du coro­na­vi­rus – le reste est à la charge des pro­prié­taires. C’est ce que pré­voit le pro­jet de loi rédigé par le Conseil fédé­ral pour mettre en œuvre deux motions. Il est inac­cep­table, aux yeux de l’éco­no­mie, d’in­ter­fé­rer rétro­ac­ti­ve­ment dans des rela­tions contrac­tuelles de droit privé exis­tantes. De plus, le pro­jet empê­che­rait bien sou­vent la conclu­sion d’ac­cords à l’amiable et de par­te­na­riat et crée­rait une inéga­lité de trai­te­ment fla­grante entre pro­prié­taires et loca­taires. À notre avis, le Conseil natio­nal doit donc suivre la majo­rité de la com­mis­sion et refu­ser d’en­trer en matière.

L’éco­no­mie est lar­ge­ment favo­rable à la trans­po­si­tion dans la loi de l’ordon­nance tem­po­raire sur les cau­tion­ne­ments soli­daires. eco­no­mie­suisse salue en par­ti­cu­lier les adap­ta­tions appor­tées à l’or­don­nance, notam­ment l’as­sou­plis­se­ment de l’in­ter­dic­tion de réa­li­ser de nou­veaux inves­tis­se­ments, la pro­lon­ga­tion de la période d’amor­tis­se­ment et la lutte contre les abus même après l’oc­troi du prêt. Tou­te­fois, la pro­po­si­tion de la Com­mis­sion de l’éco­no­mie (CER-N) d’in­ter­dire aux entre­prises ayant reçu des cré­dits «Covid-19» de ver­ser des divi­dendes va trop loin pour les entre­prises. En par­ti­cu­lier pour les entre­prises fami­liales dont la suc­ces­sion a été fixée par contrat, l’in­ter­dic­tion de ver­ser des divi­dendes peut avoir des consé­quences dra­ma­tiques.

Une motion de la Com­mis­sion des finances du Conseil natio­nal (CdF-N) demande que les dépenses extra­or­di­naires enga­gées pour faire face à la pan­dé­mie de coro­na­vi­rus ne soient pas comp­ta­bi­li­sées dans le compte d’amor­tis­se­ment, confor­mé­ment au frein à l’en­det­te­ment, mais comme des «dettes publiques». eco­no­mie­suisse rejette fer­me­ment cette demande. La pan­dé­mie de coro­na­vi­rus ne doit pas ser­vir de pré­texte pour pas­ser outre le frein à l’en­det­te­ment dès la pre­mière vraie épreuve. Le Par­le­ment devrait plu­tôt uti­li­ser les pos­si­bi­li­tés légales, comme celle d’étendre le délai d’amor­tis­se­ment dans cer­tains cas.

Les contacts directs entre les acteurs poli­tiques et la société civile font par­tie de la démo­cra­tie directe de la Suisse et sont indis­pen­sables à l’ac­cep­ta­tion de celle-ci. Dans le cadre de la mise en œuvre de l’ini­tia­tive par­le­men­taire Ber­be­rat, qui demande l’in­tro­duc­tion d’un sys­tème d’ac­cré­di­ta­tion pour les lob­byistes, eco­no­mie­suisse s’en­gage donc éga­le­ment pour un accès facile et non bureau­cra­tique au Par­le­ment et à la salle des pas per­dus.

Pour de plus amples infor­ma­tions sur les objets trai­tés, veuillez lire les expli­ca­tions ci-après.

Conseil natio­nal

Concept de la CIP-N: des charges admi­nis­tra­tives sup­plé­men­taires énormes et pas plus de trans­pa­rence

En 2016, après quelques ter­gi­ver­sa­tions, les Chambres fédé­rales ont donné suite à une ini­tia-tive par­le­men­taire deman­dant l’in­tro­duc­tion d’un sys­tème d’ac­cré­di­ta­tion pour les lob­byistes sou­hai­tant avoir accès au Palais du Par­le­ment. Un registre consul­table par le public et mis à jour en per­ma­nence par les ser­vices par­le­men­taires, sur lequel les lob­byistes doivent s’ins­crire et décla­rer chaque man­dat ainsi que leur employeur le cas échéant doit ainsi être intro­duit.

L’ini­tia­tive par­le­men­taire est mise en œuvre via la pré­sente modi­fi­ca­tion de la loi sur le Parle-ment (LParl) et de l’or­don­nance cor­res­pon­dante (ordon­nance sur l’ad­mi­nis­tra­tion du Parle-ment, OLPA).

Posi­tion d'eco­no­mie­suisse

La repré­sen­ta­tion des inté­rêts dans tous les domaines de la poli­tique éco­no­mique vis-à-vis des poli­ti­ciens, des auto­ri­tés et du public fait par­tie de la mis­sion prin­ci­pale d’eco­no­mie­suisse. Pour l’as­so­cia­tion faî­tière, il est essen­tiel de pou­voir rem­plir ce man­dat, et ce, sans avoir à sur­mon­ter des obs­tacles bureau­cra­tiques exces­sifs, voire à subir des désa­van­tages (concur­ren­tiels) par rap­port à d’autres groupes d’in­té­rêt.

Le contact direct entre la poli­tique et les acteurs de la société civile fait par­tie de la démo­cra­tie directe de la Suisse et est indis­pen­sable à son accep­ta­tion. Les contacts doivent être trans­pa­rents et les inté­rêts doivent être divul­gués. La pos­si­bi­lité d’éta­blir un contact direct doit cepen­dant être offerte à de larges cercles, pré­ci­sé­ment pour exclure les influences uni­la­té­rales tant redou­tées.

La pos­si­bi­lité d’ac­cé­der au Palais du Par­le­ment - et à la salle des pas per­dus pen­dant les ses­sions - faci­lite consi­dé­ra­ble­ment les échanges et les contacts avec les par­le­men­taires tous par­tis confon­dus, ainsi qu’avec leurs col­la­bo­ra­teurs. Cet accès reflète la concep­tion libé­rale et proche des citoyens sur laquelle repose le sys­tème poli­tique suisse, et en par­ti­cu­lier le sys­tème de milice. Les res­tric­tions d'ac­cès aux Chambres fédé­rales risquent d’être consi­dé­rées comme une mesure éli­tiste pré­ju­di­ciable à l’ac­cep­ta­tion et à la cré­di­bi­lité de la poli­tique fédé­rale. Par consé­quent, il faut renon­cer à des dis­po­si­tions très res­tric­tives telles que le pré­voit la mise en œuvre de l’ini­tia­tive par­le­men­taire Ber­be­rat pro­po­sée par le Conseil natio­nal.

Une limi­ta­tion de l’ac­cès aux Chambres fédé­rales ne favo­ri­se­rait pas non plus la trans­pa­rence. Les milieux poli­tiques seraient encore davan­tage per­çus comme cou­pés de la réa­lité et influen­cés par des inté­rêts uni­la­té­raux béné­fi­ciant d’un accès pri­vi­lé­gié. Si, à l’ave­nir, des repré­sen­tants d’in­té­rêts devaient être enga­gés par des par­le­men­taires en tant que col­la­bo­ra­teurs per­son­nels et obte­naient ainsi en plus la pos­si­bi­lité de consul­ter les docu­ments des com­mis­sions, cela ne serait guère pro­pice à la trans­pa­rence de manière géné­rale. En outre, les ren­contres des groupes d’in­té­rêt avec les par­le­men­taires auraient lieu en cachette puis­qu’elles ne seraient plus visibles par tout le monde. Dif­fi­cile de com­prendre à qui un tel chan­ge­ment de sys­tème pro­fi­te­rait.

eco­no­mie­suisse pré­co­nise de main­te­nir un accès facile et non bureau­cra­tique au Par­le­ment et à la salle des pas per­dus. Que le sys­tème actuel soit main­tenu ou qu’un méca­nisme d’ac­cré­di­ta­tion soit créé à cette fin ne joue pas un rôle déci­sif.

État des déli­bé­ra­tions

Le Conseil natio­nal, deuxième Chambre déli­bé­rante, trai­tera les pro­jets pen­dant la ses­sion spé­ciale de 2020.

Ce n’est qu’après une âpre lutte que la Chambre haute est par­ve­nue à un accord sur une modi­fi­ca­tion minime de la loi lors de la ses­sion d’hi­ver 2018 (par 24 voix contre 14). Contrai­re­ment au man­dat de l’ini­tia­tive par­le­men­taire, cet accord ne pré­voit pas l’in­tro­duc­tion d’un sys­tème d’ac­cré­di­ta­tion, mais le main­tien du sys­tème de badge exis­tant : selon ces ajus­te­ments, (1) les lob­byistes des agences devront à l’ave­nir four­nir des ren­sei­gne­ments concrets sur leurs man­dats avant d’ob­te­nir l’ac­cès au Palais du Par­le­ment ; les visi­teurs d’un jour (2) devront désor­mais être accom­pa­gnés en per­ma­nence par le député qui les invite et (3) les anciens par­le­men­taires pour­ront conser­ver leur badge per­ma­nent, mais seront sou­mis aux mêmes obli­ga­tions de divul­ga­tion que les autres repré­sen­tants d’in­té­rêts lors­qu’ils feront du lob­bying.

Après avoir décidé de ne pas entrer en matière en juin 2019, le Conseil natio­nal dans sa nou­velle com­po­si­tion a accepté de se pen­cher sur le pro­jet en décembre 2019. Sa Com­mis­sion des ins­ti­tu­tions poli­tiques (CIP-N) a main­te­nant com­plè­te­ment rema­nié le pro­jet. Elle pro­pose un concept selon lequel les lob­byistes ne peuvent pré­tendre à un badge per­ma­nent que s’ils sont un col­la­bo­ra­teur per­son­nel d’un député ou s’ils font par­tie de sa famille. Toutes les autres per­sonnes peuvent accé­der à une par­tie res­treinte du Palais du Par­le­ment uni­que­ment en tant que visi­teurs. Pour ce faire, ils doivent se pro­cu­rer une carte d’ac­cès jour­na­lière et s’ins­crire au préa­lable en res­pec­tant des exi­gences de divul­ga­tion éten­dues. À l’ave­nir, ils se ver­ront refu­ser l’ac­cès à la salle des pas per­dus.

L'ÉCO­NO­MIE SE FÉLI­CITE DU PRO­JET, MAIS PRO­POSE DES AJUS­TE­MENTS PONC­TUELS

Adop­tée le 25 mars 2020, au plus fort de la pan­dé­mie, l’or­don­nance de néces­sité – et donc limi­tée dans le temps – sur les cau­tion­ne­ments soli­daires liés au Covid‑19 doit être trans­po­sée dans le droit ordi­naire (légis­la­tif). L’or­don­nance de néces­sité du Conseil fédé­ral res­tera valable jus­qu’à l’en­trée en vigueur de la loi sur les cau­tion­ne­ments soli­daires liés au Covid‑19 (LCaS-Covid‑19) pro­po­sée.

Le pré­sent pro­jet de loi règle les droits et les obli­ga­tions des quatre orga­ni­sa­tions de cau­tion­ne­ment recon­nues par l’État, en par­ti­cu­lier pour les cas où les banques ou Post­Fi­nance SA sol­li­citent les cau­tion­ne­ments et où les créances de cré­dit sont par consé­quent trans­fé­rées aux orga­ni­sa­tions de cau­tion­ne­ment. En même temps, la nou­velle loi règle toutes les ques­tions impor­tantes qui se posent pen­dant la durée des cré­dits et des cau­tion­ne­ments. Elle contient en outre des ins­tru­ments pour la lutte contre les abus et le trai­te­ment des cas de rigueur.

Posi­tion d'eco­no­mie­suisse

eco­no­mie­suisse recom­mande d’ac­cep­ter le pro­jet avec des modi­fi­ca­tions. L’éco­no­mie approuve lar­ge­ment les adap­ta­tions appor­tées par rap­port à l’or­don­nance, dont l’as­sou­plis­se­ment de l’in­ter­dic­tion de nou­veaux inves­tis­se­ments, la pro­lon­ga­tion du délai d’amor­tis­se­ment et la lutte contre les abus même après l’oc­troi des prêts. Tout autre écart par rap­port à l’or­don­nance de néces­sité doit être fait avec dis­cer­ne­ment. Il faut sur­tout être conscients que chaque nou­velle «faci­lité» cause une inéga­lité de trai­te­ment entre les entre­prises béné­fi­ciant ou non d’un cré­dit Covid-19.

Adap­ta­tion modé­rée des res­tric­tions

Pour évi­ter l’uti­li­sa­tion abu­sive des cré­dits Covid-19 leur ver­se­ment est assorti de res­tric­tions pour l’en­tre­prise béné­fi­ciaire. Il s’agit tou­te­fois de trou­ver ici un équi­libre entre la lutte contre les abus et les res­tric­tions exces­sives. À cause de celles-ci, beau­coup d’en­tre­prises hésitent à recou­rir aux prêts devant garan­tir leurs liqui­di­tés.

  • Nou­veaux inves­tis­se­ments: Nous nous réjouis­sons que les nou­veaux inves­tis­se­ments soient auto­ri­sés, car ils sont indis­pen­sables pour main­te­nir la capa­cité concur­ren­tielle. Les entre­prises suisses ne peuvent accroître leur effi­ca­cité qu’à force d’in­ves­tis­se­ments, par exemple dans la numé­ri­sa­tion. Cette adap­ta­tion se jus­ti­fie aussi parce que, dans la pra­tique, il peut être très dif­fi­cile de dis­tin­guer entre nou­veaux inves­tis­se­ments et inves­tis­se­ments de rem­pla­ce­ment. Les incer­ti­tudes en résul­tant dans les échanges com­mer­ciaux affectent autant les pre­neurs que les four­nis­seurs des cré­dits. L’in­ter­dic­tion des inves­tis­se­ments devrait cepen­dant être levée sans délai, d’au­tant plus que la régle­men­ta­tion pré­vue peut induire une dis­cri­mi­na­tion des béné­fi­ciaires de cré­dits.
  • Divi­dendes: Sou­vent, l’in­ter­dic­tion abso­lue de ver­ser des divi­dendes va en fait trop loin. Au moins dans les cas de rigueur, le ver­se­ment de divi­dendes devrait donc être pos­sible, mais uni­que­ment sur auto­ri­sa­tion préa­lable de l’or­ga­ni­sa­tion de cau­tion­ne­ment com­pé­tente ou de l’or­gane cen­tral mis en place par les orga­ni­sa­tions de cau­tion­ne­ment, afin d’évi­ter les abus. Si cette appré­cia­tion ne convainc pas, il convient de suivre la ver­sion du Conseil fédé­ral.

État des déli­bé­ra­tions

Le Conseil natio­nal, pre­mier conseil, exa­mi­nera ce pro­jet lors de la ses­sion spé­ciale 2020. Avec de courtes majo­ri­tés, sa Com­mis­sion de l’éco­no­mie et des rede­vances (CER-N) pro­pose des modi­fi­ca­tions impor­tantes du pro­jet fédé­ral, notam­ment la pro­lon­ga­tion à huit ans du délai d’amor­tis­se­ment des cré­dits et le main­tien pen­dant huit ans des taux d’in­té­rêt conve­nus lors de l’oc­troi des prêts. Lors du vote sur l’en­semble, la com­mis­sion a accepté le pro­jet à l’una­ni­mité.

Des inter­ven­tions éta­tiques à tout-va empêchent la conclu­sion d’ac­cords de par­te­na­riat

Lors de la ses­sion d’été 2020, les Chambres fédé­rales ont approuvé deux motions iden­tiques dépo­sées par les com­mis­sions de l’éco­no­mie et des rede­vances (20.3451 et 20.3460), qui chargent le Conseil fédé­ral de pré­sen­ter une régle­men­ta­tion dans le domaine des loyers com­mer­ciaux.

Le pro­jet du Conseil fédé­ral pré­voit que les loca­taires tou­chés par une fer­me­ture ou une res­tric­tion stricte au prin­temps 2020 en rai­son de la pan­dé­mie de Covid-19 paie­ront 40% du loyer pour cette période. Les 60% res­tants sont à la charge des pro­prié­taires.

L’avant-pro­jet sou­mis en consul­ta­tion avait sus­cité une contro­verse. C’est pour­quoi le Conseil fédé­ral s’est abs­tenu de deman­der au Par­le­ment d’ap­prou­ver le pro­jet lors­qu’il a adopté le mes­sage le 18 sep­tembre 2020.

Posi­tion d'eco­no­mie­suisse

eco­no­mie­suisse recom­mande de suivre la majo­rité de la CAJ-N et de ne pas entrer en matière sur le pro­jet de loi.

Une inter­ven­tion dis­pro­por­tion­née dans les droits fon­da­men­taux

La Consti­tu­tion fédé­rale garan­tit la pro­priété (art. 26 Cst.) et la liberté éco­no­mique (art. 27 Cst.). S’agis­sant de ces droits fon­da­men­taux, seules des inter­ven­tions pro­por­tion­nées sont admises. Cette condi­tion n’est pas rem­plie ici. Le pro­jet repré­sente un concept d’ex­pro­pria­tion arbi­traire qui – indé­pen­dam­ment de la capa­cité éco­no­mique des loca­taires – fait peser les consé­quences d’une crise his­to­rique sur les seuls pro­prié­taires dans le cadre d’une rela­tion juri­dique mutuelle.

Effet contraire

La loi Covid-19 sur les loyers com­mer­ciaux occa­sionne des dom­mages éco­no­miques au lieu d’ap­por­ter des avan­tages. Elle accroî­trait l’in­sé­cu­rité juri­dique, empê­che­rait sou­vent la conclu­sion d’ac­cords à l’amiable et de par­te­na­riats et crée­rait une inéga­lité de trai­te­ment fla­grante entre les pro­prié­taires et les loca­taires.

État des déli­bé­ra­tions

Le Conseil natio­nal, pre­mier conseil, exa­mi­nera ce pro­jet lors de la ses­sion spé­ciale 2020. Sa Com­mis­sion des affaires juri­diques (CAJ-N) lui pro­pose de le reje­ter (14 voix contre 11). Elle estime par­ti­cu­liè­re­ment cho­quant que la loi s’ap­plique de manière rétro­ac­tive à des rela­tions contrac­tuelles de droit privé exis­tantes. La majo­rité consi­dère qu’il s’agit d’une inter­ven­tion contraire à la Consti­tu­tion et dis­pro­por­tion­née dans les droits contrac­tuels exis­tants..

La crise du coro­na­vi­rus ne doit pas ser­vir de pré­texte pour saper le frein à l’en­det­te­ment

Confor­mé­ment à la règle com­plé­men­taire au frein à l’en­det­te­ment, en pré­sence d’évo­lu­tions extra­or­di­naires ne pou­vant pas être influen­cées par la Confé­dé­ra­tion, les dépenses extra­or­di­naires sont ins­crites dans le compte d’amor­tis­se­ment du bud­get extra­or­di­naire. La loi sur les finances exige que les défi­cits du compte d’amor­tis­se­ment soient com­pen­sés par des dépenses ordi­naires infé­rieures dans un délai de six ans. Le Par­le­ment peut, dans cer­tains cas, pro­lon­ger ce délai.

La motion demande que les dépenses extra­or­di­naires réa­li­sées pour faire face à la pan­dé­mie de coro­na­vi­rus ne soient pas ins­crites dans le compte d’amor­tis­se­ment, comme le pré­voit le frein à l’en­det­te­ment, mais qu’elles soient plu­tôt comp­ta­bi­li­sées sous la forme de «dettes publiques», hors du champ du frein à l’en­det­te­ment.

Posi­tion d'eco­no­mie­suisse

eco­no­mie­suisse recom­mande de reje­ter cette motion.

Pour sur­mon­ter la crise, le Conseil fédé­ral et le Par­le­ment ont décidé des mesures d’ur­gence pour un mon­tant de plus de 70 mil­liards de francs. Sachant que toutes les mesures déci­dées n’en­traî­ne­ront pas une sor­tie de fonds immé­diate ou que les fonds approu­vés ne seront pas tous uti­li­sés inté­gra­le­ment, il faut s’at­tendre à un défi­cit du compte d’amor­tis­se­ment de 15 mil­liards envi­ron en 2020. C’est moins, et de loin, que ce que l’on ima­gi­nait (lors du dépôt de la motion).

La motion demande une vio­la­tion grave du frein à l’en­det­te­ment

La Confé­dé­ra­tion est tenue, en vertu de la Consti­tu­tion, de main­te­nir l’équi­libre entre ses recettes et ses dépenses à long terme. Cela s’ap­plique éga­le­ment aux dépenses extra­or­di­naires, telles que celles déci­dées par le Par­le­ment pour faire face aux consé­quences de la pan­dé­mie de coro­na­vi­rus. Les dépenses extra­or­di­naires et les dettes qui en découlent doivent être com­pen­sées dans un cer­tain délai. Elles ne peuvent pas être «sim­ple­ment oubliées» et l’amor­tis­se­ment des dettes ne peut être reporté indé­fi­ni­ment. La pan­dé­mie de coro­na­vi­rus ne doit pas être uti­li­sée comme pré­texte pour pas­ser outre au frein à l’en­det­te­ment à la pre­mière vraie épreuve.

Le peuple a sou­tenu à une écra­sante majo­rité l’in­tro­duc­tion du frein à l’en­det­te­ment et s’est ainsi opposé à une poli­tique finan­cière «situa­tion­nelle» qui avait conduit à l’ac­cu­mu­la­tion de nou­velles dettes très impor­tantes au fil des ans. Il a ainsi mis en place une poli­tique finan­cière fon­dée sur des règles, axée sur la dura­bi­lité et mise en œuvre dans la loi de manière appro­priée. La règle com­plé­men­taire au frein à l’en­det­te­ment pour les dépenses extra­or­di­naires fait par­tie inté­grante du dis­po­si­tif. La motion demande expli­ci­te­ment une rup­ture avec ce dis­po­si­tif ins­crit dans la loi et donc avec la poli­tique finan­cière fon­dée sur des règles que la peuple a sou­hai­tée. Une telle demande est irri­tante et aucun argu­ment ne parle en sa faveur.

Pro­lon­ger le délai pour l’amor­tis­se­ment des dettes, affec­ter les moyens de manière contrai­gnante

Pour amor­tir les dettes liées au coro­na­vi­rus, le Par­le­ment peut uti­li­ser les pos­si­bi­li­tés pré­vues actuel­le­ment dans la loi. Il est pos­sible de pro­lon­ger le délai dans cer­tains cas. Autre­ment dit, le délai de six ans prévu pour amor­tir les dettes liées au coro­na­vi­rus peut être pro­longé en vertu de la loi. Un délai réa­liste est déter­miné sur la base du niveau effec­tif des dettes et des res­sources uti­li­sées pour les amor­tir. Concrè­te­ment, les moyens uti­li­sés pour amor­tir les dettes sont les soldes de cré­dit du bud­get ordi­naire, les éven­tuelles recettes extra­or­di­naires et la part de la Confé­dé­ra­tion aux béné­fices dis­tri­bués par la Banque natio­nale suisse (BNS). Ces fonds peuvent être affec­tés à l’amor­tis­se­ment des dettes sans que le bud­get ordi­naire actuel soit menacé. L’ac­com­plis­se­ment des tâches par la Confé­dé­ra­tion reste garanti.

État des déli­bé­ra­tions

Le Conseil natio­nal, pre­mier Conseil, exa­mi­nera cette motion pen­dant la ses­sion d’hi­ver 2020.

Le Conseil fédé­ral pro­pose de la reje­ter.