La confiance, pierre angu­laire de la numé­ri­sa­tion

Co-auteur: Sébas­tien Kul­ling, direc­teur romand de digi­tals­wit­zer­land.

Pira­tage, vol de don­nées, spam­ming, pas une jour­née sans qu’un inci­dent lié à la cyber­sé­cu­rité soit rap­porté par les médias. La coopé­ra­tion est le meilleur moyen de rele­ver les défis posés par la numé­ri­sa­tion et d’af­fron­ter leur com­plexité.

La cyber­cri­mi­na­lité touche aussi bien les Etats que les entre­prises et les par­ti­cu­liers. Elle est de plus en plus sophis­ti­quée et coûte à l’en­semble de la société. L’in­ter­con­nexion des réseaux et la mul­ti­pli­ca­tion des objets connec­tés créent en effet de nou­velles vul­né­ra­bi­li­tés. La ques­tion de la cyber­sé­cu­rité, comme celle de la pro­tec­tion des don­nées, illustre bien à quel point la confiance dans les infra­struc­tures numé­riques et entre les indi­vi­dus, les entre­prises et l’Etat est cru­ciale. On a cou­tume de dire que les don­nées sont le car­bu­rant de la numé­ri­sa­tion, mais la confiance en est l’in­dis­pen­sable cour­roie de trans­mis­sion. C’est un enjeu crois­sant pour toutes les par­ties pre­nantes à la numé­ri­sa­tion.

Les entre­prises déve­loppent aujour­d’hui des pro­duits au plus près des attentes de leurs clients et l’ac­cent est mis sur l’ex­pé­rience du consom­ma­teur. Cela est rendu pos­sible par la col­lecte, le trai­te­ment et le trans­fert d’im­por­tants volumes de don­nées – et notam­ment de don­nées per­son­nelles. Ces der­nières doivent donc être pro­té­gées. Car si les entre­prises ne sont pas en mesure de garan­tir cette sécu­rité, la confiance du consom­ma­teur s’érode rapi­de­ment. Il en est de même pour la rela­tion entre le citoyen et l’Etat, puisque les admi­nis­tra­tions sont, elles aussi, de plus en plus numé­ri­sées. Les résul­tats obte­nus par la mise en réseau d’ac­teurs divers et qui n’avaient pas l’ha­bi­tude de tra­vailler ensemble sont rapides et posi­tifs.

La voie royale de la coopé­ra­tion

La coopé­ra­tion est le meilleur moyen de rele­ver les défis posés par la numé­ri­sa­tion et d’af­fron­ter leur com­plexité. Cela implique que chaque acteur connaisse son rôle et assume sa part de res­pon­sa­bi­lité. On pense à la col­la­bo­ra­tion entre entre­prises mais aussi à des par­te­na­riats public-privé. Il ne faut pas non plus sous-esti­mer le rôle de la société civile. En coopé­rant, les acteurs apprennent à se connaître, iden­ti­fient leurs besoins et défi­nissent ensemble les solu­tions. Or si la numé­ri­sa­tion sus­cite de nou­velles ques­tions et de nou­velles craintes, elle fait aussi émer­ger de nou­veaux modes de tra­vail en com­mun, ainsi que des approches plus flexibles. Elle encou­rage des échanges entre par­te­naires et des alliances dites «impro­bables» mais qui se révèlent robustes.

Plu­sieurs ini­tia­tives voient le jour dans ce sens. Ainsi, l’as­so­cia­tion digi­tals­wit­zer­land a mis en place des groupes de tra­vail, les «chal­lenges», per­met­tant à dif­fé­rents acteurs de tra­vailler ensemble, alors que ces der­niers n’avaient pas pour habi­tude de coopé­rer. Cela favo­rise le décloi­son­ne­ment, l’échange des com­pé­tences et assure une cir­cu­la­tion de l’ex­per­tise. C’est par­ti­cu­liè­re­ment mani­feste dans deux pro­jets. Le pre­mier vise à inté­grer la tech­no­lo­gie blo­ck­chain dans les registres du com­merce can­to­naux. L’idée de base était de trou­ver un moyen de faci­li­ter et d'ac­cé­lé­rer le pro­ces­sus de consti­tu­tion d’une entre­prise tout en dimi­nuant la bureau­cra­tie et en assu­rant la sécu­rité. Pour ce faire, admi­nis­tra­tions can­to­nales et entre­prises ont uni leurs forces et leur savoir-faire. Le même type d’al­liance mène le pro­jet Riva­Di­gi­tal, dans le domaine de la santé. Il s’agit ici de détec­ter les cas d’hy­per­ten­sion arté­rielle et d’en­cou­ra­ger des modes de vie lut­tant contre cette patho­lo­gie. Les résul­tats obte­nus par la mise en réseau d’ac­teurs divers et qui n’avaient pas l’ha­bi­tude de tra­vailler ensemble sont rapides et posi­tifs. Ces exemples montrent que la voie de la coopé­ra­tion est pro­met­teuse et à même de créer de nou­velles rela­tions de confiance.

Pro­ces­sus d'ap­pren­tis­sage per­ma­nent

Ces exemples montrent que la coopé­ra­tion est une voie pro­met­teuse et qu'elle per­met d'éta­blir des rela­tions de confiance. Coopé­ra­tion et res­pon­sa­bi­li­sa­tion sont donc essen­tielles pour agir plus effi­ca­ce­ment. Il s’agit de pro­ces­sus d’ap­pren­tis­sage gra­duels et per­ma­nents. Dans un envi­ron­ne­ment de plus en plus numé­rique, nous avons besoin d’une valeur pro­fon­dé­ment humaine qui reste la confiance en l’autre. La Suisse a des atouts pour res­ter à la pointe de l’in­no­va­tion et opé­rer le pas­sage au numé­rique avec suc­cès, à condi­tion de ne pas oublier que l’union fait la force.

Cet article a paru dans Le Temps le 19 mars 2018.