Suisse-Europe : com­ment évi­ter le spectre du black-out ?

Sta­bi­lité du réseau, sor­tie du nucléaire, déve­lop­pe­ment des renou­ve­lables, dif­fi­cul­tés d’ap­pro­vi­sion­ne­ment, ten­sions géo­po­li­tiques: sur le front élec­trique, les défis ne manquent pas.

On nous avait pré­dit le pire pour cet hiver sur le front élec­trique. En 2022, quelques mois avant l’in­va­sion de l’Ukraine, Guy Par­me­lin aler­tait sur la pos­si­bi­lité de bla­ckouts dès 2025. Depuis des années, pro­duc­teurs et four­nis­seurs d’élec­tri­cité tirent eux aussi la son­nette d’alarme. Sta­bi­lité du réseau, sor­tie du nucléaire, déve­lop­pe­ment des renou­ve­lables, dif­fi­cul­tés d’ap­pro­vi­sion­ne­ment et ten­sions géo­po­li­tiques…les défis à rele­ver ne manquent pas. Enga­gés vers la neu­tra­lité car­bone, nous sommes tou­jours plus équi­pés d'ap­pa­reils élec­triques hyper­con­nec­tés et notre consom­ma­tion va à coup sûr aug­men­ter. De plus en plus exclus du mar­ché inté­rieur euro­péen de l’élec­tri­cité, il nous fau­dra comp­ter encore un peu moins sur nos par­te­naires euro­péens. Dans ce contexte, l’ab­sence d’ac­cord sur l’élec­tri­cité avec l’Eu­rope est d’une actua­lité criante.

Reliées par 41 lignes trans­fron­ta­lières à haute ten­sion, Suisse et Union euro­péenne forment de facto un seul ter­ri­toire du point de vue élec­trique. Nos cen­trales hydro­élec­triques sont en mesure d’ex­por­ter de l’élec­tri­cité vers l’UE. L’Ita­lie, un pays en défi­cit chro­nique d’élec­tri­cité, dépend quant à elle des liai­sons qui passent par la Confé­dé­ra­tion pour impor­ter l’élec­tri­cité, notam­ment en pro­ve­nance d’Al­le­magne. Ne pou­vant garan­tir son auto­suf­fi­sance en hiver, la Suisse est elle aussi for­te­ment dépen­dante de l’élec­tri­cité euro­péenne. Notre pays consti­tue de fait un véri­table car­re­four élec­trique à l’échelle du conti­nent : le cou­rant qui tran­site chaque année par notre réseau dépasse notre consom­ma­tion natio­nale.

Alors que l’UE s’est enga­gée dans la créa­tion d’un mar­ché inté­rieur de l’éner­gie consti­tué de méca­nismes de réserves et de soli­da­rité entre Etats membres, la Suisse elle, s’en trouve de plus en plus exclue. Faute d’un accord avec l’UE, elle est ban­nie de divers organes régu­lant les échanges d’éner­gie trans­fron­ta­liers. Un tel décou­plage avec le mar­ché euro­péen occa­sionne des coûts en constante aug­men­ta­tion – 300 mil­lions de francs d’ici 2030 - et pour­rait engen­drer dès 2025 une forte baisse des volumes d’im­por­ta­tion depuis l’UE. Selon les esti­ma­tions, un black-out coû­te­rait 4 mil­liards de francs par jour ! Face à la mul­ti­pli­cité des menaces, la diver­si­fi­ca­tion des sources d’ap­pro­vi­sion­ne­ment est d’une impor­tance capi­tale. Il devient impé­ra­tif de déve­lop­per la pro­duc­tion en Suisse et de sécu­ri­ser notre appro­vi­sion­ne­ment élec­trique en pro­ve­nance d’Eu­rope, ce qui, ici aussi, passe par un déblo­cage du dos­sier euro­péen.

Pour en savoir plus sur ce thème, écou­tez le der­nier pod­cast de l’Al­liance pour une poli­tique euro­péenne construc­tive éga­le­ment dis­po­nible sur Spo­tify et Apple Pod­casts.

Article paru dans l'édi­tion d'août 2023 de ECHO, le maga­zine de l'éco­no­mie fri­bour­geoise