Nou­velles régle­men­ta­tions: ralen­tis­sons le rythme!

À la sur­prise géné­rale les ambas­sa­deurs des Etats membres de l’UE ont décidé, le 9 février der­nier, de repor­ter le vote sur la direc­tive euro­péenne rela­tive au devoir de vigi­lance des entre­prises en matière de dura­bi­lité (CSDDD). Pour­quoi ce report? Quelles consé­quences pour la Suisse? Cet article vise à répondre à ces ques­tions et à poser le cadre autour de ce débat d’ac­tua­lité.

Le 9 février der­nier les ambas­sa­deurs des Etats membres de l’UE ont décidé de repor­ter le vote sur la direc­tive euro­péenne rela­tive au devoir de vigi­lance des entre­prises en matière de dura­bi­lité (CSDDD). Les négo­cia­teurs du Conseil de l’UE et du Par­le­ment euro­péen étaient pour­tant par­ve­nus, mi-décembre, à un accord sur cette direc­tive pré­sen­tée par la Com­mis­sion euro­péenne en 2022. Ce coup d’ar­rêt est sur­pre­nant dans la mesure où, jus­qu’à pré­sent, l'UE s'était plu­tôt dis­tin­guée pour son grand empres­se­ment à accou­cher d’une mul­ti­tude de normes et régle­men­ta­tions, qui plus est à l’ap­proche des élec­tions euro­péennes.

Mais trop c’est trop. Et trop vite. Tout comme les agri­cul­teurs, les entre­prises et leurs repré­sen­tants tirent la son­nette d’alarme face à l’am­pleur des normes impo­sées à un rythme sou­tenu et à la charge admi­nis­tra­tive consi­dé­rable qui en découle. Sans par­ler du risque réel de perte de com­pé­ti­ti­vité face aux autres places éco­no­miques mon­diales. C’est ce qu’on fait savoir plu­sieurs pays dont l’Al­le­magne, l’Ita­lie, l’Au­triche ou encore la Suède qui s’op­posent à l’ac­tuelle mou­ture de la CSDDD – suite à la forte mobi­li­sa­tion notam­ment de Busi­nes­sEu­rope et de fédé­ra­tions éco­no­miques natio­nales de dif­fé­rents pays euro­péens.

La CSDDD, qui s’ins­crit dans le Green Deal, n’est pas pour autant enter­rée. Les ONG et cer­tains Etats conti­nue­ront à exer­cer une forte pres­sion. Néan­moins, des modi­fi­ca­tions de taille devront vrai­sem­bla­ble­ment être appor­tées pour que la direc­tive passe le cap du Conseil euro­péen. Cela laisse un peu de répit bien­venu aux plu­sieurs cen­taines d’en­tre­prises hel­vé­tiques qui seraient direc­te­ment concer­nées et per­met éga­le­ment d’es­pé­rer que les demandes des entre­prises soient davan­tage prises en compte si la direc­tive devait fina­le­ment être adop­tée par l’UE.

En Suisse, la Coa­li­tion pour des mul­ti­na­tio­nales res­pon­sables milite depuis quelques années pour que notre pays lance d’ores et déjà l’adap­ta­tion de notre légis­la­tion et ce avant même que la CSDDD ne soit sous toit. Cette posi­tion n’est pas res­pon­sable et péna­li­se­rait for­te­ment les entre­prises suisses. Ces der­nières seraient en effet sou­mises à des normes strictes dont on ne sait, d’une part, même pas si elles figu­re­ront dans la direc­tive finale et, d’autre part, encore moins com­ment elles seraient appli­quées concrè­te­ment au sein de l’UE.

eco­no­mie­suisse s’op­pose for­te­ment à une telle pré­ci­pi­ta­tion, esti­mant non seule­ment qu’il faut attendre les termes défi­ni­tifs de la direc­tive mais aussi les moda­li­tés concrètes de sa mise en œuvre par les Etats membres. Notre faî­tière semble avoir été enten­due par le Conseil fédé­ral, comme il l’a annoncé le 22 décembre der­nier. Avec prag­ma­tisme il a ainsi com­mu­ni­qué qu’il déci­dera de la marche à suivre lors­qu'il dis­po­sera des élé­ments défi­ni­tifs et une fois qu'il connaî­tra les moda­li­tés selon les­quelles les États membres met­tront la direc­tive en œuvre. Mettre la char­rue avant les bœufs est en effet tout sauf res­pon­sable, il en va de la com­pé­ti­ti­vité de l’éco­no­mie suisse.

Ce blog a été publié dans l'AGEFI le 21 février 2024.