Drapeaux américain et suisse

Sur­taxe sur les impor­ta­tions amé­ri­caines d’acier et d’alu­mi­nium: consé­quences pour l’éco­no­mie suisse d’ex­por­ta­tion

Le pré­sident amé­ri­cain Donald Trump a signé un décret intro­dui­sant une sur­taxe pour les impor­ta­tions d’acier et d’alu­mi­nium. Seuls 2,7% de nos expor­ta­tions mon­diales d’acier et d’alu­mi­nium sont des­ti­nées aux États-Unis.

La déci­sion est prise: la sur­taxe est intro­duite à comp­ter du 23 mars 2018. Le Canada et le Mexique y échappent – tout comme les «alliés». On sait désor­mais quelles impor­ta­tions se ver­ront infli­ger une sur­taxe à par­tir du 23 mars pro­chain. Pour l’acier, elle se mon­tera à 25% et pour l’alu­mi­nium à 10%.

En 2017, les entre­prises suisses ont exporté plus de 18 000 tonnes d’acier et d’alu­mi­nium à des­ti­na­tion des États-Unis. Le volume des expor­ta­tions d’acier repré­sen­tait 57 mil­lions de francs suisses et celui des expor­ta­tions d’alu­mi­nium 30 mil­lions. Cela cor­res­pond à 2,7% des expor­ta­tions mon­diales d’alu­mi­nium et d’acier de la Suisse. Dès lors que le décret amé­ri­cain pré­voit des excep­tions, il fau­dra exa­mi­ner, dans les pro­chains jours, l’ap­pli­ca­tion ou non de la sur­taxe aux expor­ta­tions suisses d’acier et d’alu­mi­nium. Même si cer­taines entre­prises sont tou­chées par cette déci­sion, l’im­pact direct sur l’en­semble de l’éco­no­mie suisse res­tera rela­ti­ve­ment faible. Cepen­dant, l’ex­pé­rience a mon­tré que des droits de douane puni­tifs ont des effets néga­tifs. Selon diverses études, les taxes à l’im­por­ta­tion intro­duites par le pré­sident Bush en 2002 ont conduit à la sup­pres­sion de 200 000 emplois envi­ron et à une baisse de la masse sala­riale de 4 mil­liards de dol­lars.

Des coûts admi­nis­tra­tifs éle­vés

Par ailleurs, les coûts admi­nis­tra­tifs engen­drés par l’in­gé­rence de l’État dans les flux com­mer­ciaux ne doivent pas être sous-esti­més. Étant donné que cer­tains groupes de pro­duits sont frap­pés de droits de douane plus éle­vés en fonc­tion du lieu de fabri­ca­tion, des preuves d’ori­gine et des pro­cé­dures de contrôle strictes seront requises. Ce sont autant de coûts admi­nis­tra­tifs sup­plé­men­taires pour les pro­duc­teurs et les clients qui ren­ché­rissent la chaîne de valeur mon­diale.

Une guerre com­mer­ciale pèse­rait sur la conjonc­ture mon­diale

Des mesures de rétor­sion en cas­cade engen­dre­raient des dom­mages net­te­ment plus signi­fi­ca­tifs. L’UE a immé­dia­te­ment exigé un «sta­tut spé­cial». Autre­ment dit, la diplo­ma­tie éco­no­mique tente d’évi­ter une esca­lade. En effet, une esca­lade pèse­rait lour­de­ment sur la conjonc­ture mon­diale et aurait des effets directs sur le com­merce inter­na­tio­nal. Les entre­prises expor­ta­trices suisses ne seraient pas épar­gnées. La Chine aussi a annoncé des mesures ciblées et appro­priées.

Consé­quences pour le site de pro­duc­tion amé­ri­cain

Les États-Unis sont le pre­mier impor­ta­teur d’acier du monde. La sur­taxe sur les impor­ta­tions de pro­duits de base ren­ché­rira la pro­duc­tion indi­gène. Cela nuira à la com­pé­ti­ti­vité inter­na­tio­nale de l’in­dus­trie amé­ri­caine –  par rap­port aux impor­ta­tions de biens indus­triels dont les com­po­sants en acier ou en alu­mi­nium ne seraient pas frap­pés d’une sur­taxe par exemple. La com­pé­ti­ti­vité des États-Unis sur les mar­chés d’ex­por­ta­tion pâti­rait éga­le­ment du ren­ché­ris­se­ment de leur pro­duc­tion indus­trielle. Un tel affai­blis­se­ment de la com­pé­ti­ti­vité se tra­duira, à moyen terme, par une dimi­nu­tion de la pro­duc­tion indus­trielle aux États-Unis.

Si l’évo­lu­tion de l’in­dus­trie manu­fac­tu­rière amé­ri­caine est frei­née par une sur­taxe et que les risques poli­tiques s’ac­croissent simul­ta­né­ment, il fau­dra éga­le­ment s’at­tendre à des effets néga­tifs au niveau des inves­tis­se­ments directs aux États-Unis de cer­taines entre­prises indus­trielles suisses.

Plainte auprès de l’OMC envi­sa­geable

L’Or­ga­ni­sa­tion mon­diale du com­merce (OMC) pré­voit la pos­si­bi­lité de pro­cé­dures de règle­ment des dif­fé­rends. Le pré­sident amé­ri­cain évoque des «inté­rêts de sécu­rité natio­nale» pour jus­ti­fier l’in­tro­duc­tion d’une sur­taxe. Étant donné que l’in­dus­trie de l’ar­me­ment n’uti­lise que quelque 3% de la pro­duc­tion d’acier amé­ri­caine, une plainte contre cette jus­ti­fi­ca­tion pour­rait être dépo­sée auprès de l’OMC. Les États-Unis sou­lignent par ailleurs que le dum­ping de l’acier et de l’alu­mi­nium impor­tés menace la capa­cité de sur­vie des pro­duc­teurs amé­ri­cains d’acier et d’alu­mi­nium.

Conclu­sion pour la Suisse

Plu­sieurs entre­prises suisses seraient direc­te­ment tou­chées par l’in­tro­duc­tion de la sur­taxe sur l’acier et l’alu­mi­nium. Cepen­dant, comme les volumes concer­nés sont rela­ti­ve­ment faibles et que le décret de l'ad­mi­nis­tra­tion amé­ri­caine pré­voit des excep­tions, les consé­quences res­te­ront limi­tées. La situa­tion serait dif­fé­rente en cas d'es­ca­lade des mesures de rétor­sion de la part d’autres par­te­naires com­mer­ciaux. Une telle évo­lu­tion aurait des consé­quences néga­tives aussi bien pour les entre­prises expor­ta­trices suisses que pour les inves­tis­se­ments directs.