Pas de retour en arrière dans la politique agricole
La politique agricole cultive des fruits étranges en ce moment. Certains acteurs proposent de revenir à l’Union suisse du fromage, tandis que d’autres combattent les réformes proposées par le Conseil fédéral dans le cadre de la politique agricole 2014-2017. La Suisse ne doit pas accepter une politique agricole tournée vers le passé. Il est dans son intérêt de renforcer l’esprit d’entreprise dans ce secteur.
L’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) a effectué une consultation sur un thème particulier : l’organisation professionnelle Emmentaler Switzerland demande au Conseil fédéral de déclarer obligatoire la régulation des quantités introduite pour la production d’Emmental AOC. Les arguments évoqués sont une situation extraordinaire, la détérioration de son image et la sous-enchère de la part d’outsiders et de profiteurs. Le délai est arrivé à échéance le 4 septembre.
Union suisse du fromage : une évolution fatale
L’Union suisse du fromage (1948-1999) a été un désastre si l'on considère l’évolution à long terme. La promotion planificatrice du Gruyère, de l’Emmental et du Sbrinz, moyennant l’achat de l’ensemble de la production suisse et sa distribution à des prix fixés par le Conseil fédéral, a entraîné une baisse de la qualité et une production supérieure à la demande. Afin d’écouler l’excédent, les fromages ont été vendus à l’étranger avec une politique de prix bas. Ce dumping a sapé la création de marques de qualité. Au final, l’Union du fromage a eu pour effet de détruire en bonne et due forme une source de prospérité.
La requête formulée cet été par l’organisation Emmentaler Switzerland présente des similitudes avec ce projet. Elle propose d’introduire des contingents afin de piloter la production. Ce mécanisme non plus ne se fonde ni sur la demande ni sur une concurrence efficace. Le souci de l’efficacité et de la qualité a été abandonné en cours de route. Ce système pénaliserait les acteurs qui s’étaient préparés à des marchés ouverts. Même si la production mondiale de fromage à gros trous représente probablement un défi pour la production d’Emmental AOC, l’orientation préconisée par l’organisation professionnelle n’est pas efficace.
Des versements forfaitaires nuisent à la compétitivité
Des propositions passéistes sont également faites en lien avec le projet relatif à la politique agricole (PA 2014-17) débattue au Parlement en ce moment. L’Union des paysans demande le maintien de quelque 3,5 milliards de francs de versements directs avant tout en faveur de contributions forfaitaires à la sécurité de l’approvisionnement. Les versements forfaitaires induisent des incitations inopportunes en matière de production, avec une utilisation économiquement et écologiquement peu efficace des ressources, et favorisent le maintien de structures agricoles non viables. Les économies émergentes, dont la population aisée croît, offrent des opportunités de taille pour les produits suisses de qualité dans les domaines de l’agriculture, de l’industrie et des services. Afin que les exploitations agricoles suisses soient compétitives à long terme, la politique agricole 2014-2017 doit progressivement préparer l’agriculture à une intensification de la concurrence.
Le projet du Conseil fédéral va dans la bonne direction. Il souhaite davantage associer les versements directs aux prestations concernées et aux objectifs constitutionnels. Comme cela a été proposé, la politique agricole doit se focaliser sur l’encouragement de l’esprit d’entreprise et de la diversité des paysages, le maintien des surfaces ouvertes et l’atténuation des effets sociaux induits par l’ouverture du marché. Malheureusement, après la consultation, le Conseil fédéral a encore fait de larges concessions en faveur de l’Union suisse des paysans et, entre autre, relevé les versements forfaitaires prévus. Supprimer d’autres éléments du projet afin d’accroître encore les contributions à la sécurité de l’approvisionnement ou de réintroduire les contributions pour animaux n’est pas acceptable.
Davantage tenir compte des prestations fournies par les agriculteurs de montagne
De même, il convient de davantage tenir compte des difficultés de l’agriculture de montagne et des prestations d’intérêt public fournies par rapport aux exploitations en plaine. Dès lors que les moyens sont utilisés de manière efficace et ciblée, economiesuisse soutient le budget actuel de l’agriculture. Tel est précisément l’objectif de la réforme. Par contre, si la concordance entre les objectifs et les mesures fait défaut, le budget doit être remis en question. La Suisse a besoin d’une agriculture compétitive qui puisse utiliser les chances d’une ouverture progressive des marchés agricoles.
Réponse à la consultation mentionnée (en allemand)