Session de printemps 2020
La session parlementaire de printemps se tient du 2 au 20 mars. Voici nos prises de position sur des objets importants.
Tour d'horizon de la session
La situation politique à Berne, à la veille de la session de printemps, est comme la météo: vents tempétueux, fraîcheur étonnante, quelques rayons de soleil, parfois très doux, mais dans tous les cas inhabituelle. C’est ainsi qu’un esprit libéral perçoit les décisions annoncées par certaines commissions parlementaires. Il faut espérer que le Conseil des États et le Conseil national prendront des décisions favorables à l’économie. Toute la Suisse profite d’un tel climat: la population et les entreprises pourvoyeuses d’emplois en Suisse.
Objets passant devant les deux Chambres
Afin d’éviter aux entreprises suisses des restrictions et des risques majeurs, il faut prendre les bonnes décisions en ce qui concerne l’initiative «Entreprises responsables» et son contre-projet. La position d’economiesuisse est claire: oui au contre-projet du Conseil des États, non à l’initiative «Entreprises responsables» et non au contre-projet du Conseil national. Les deux contre-projets seront traités dans les deux Chambres et l’initiative seulement par le Conseil national.
L’heure est à l’élimination des divergences pour la loi sur la protection des données. Le Conseil national examinera le projet le premier. Il faut espérer que les deux Chambres penseront à l’économie qui a besoin d'une loi supportable sous l’angle administratif. Il convient aussi d’éviter un «Swiss finish». En d’autres termes, la Suisse doit refuser des dispositions sans valeur ajoutée pour les personnes concernées ou excessives par rapport aux réglementations d’autres pays. Une réglementation tournée vers l’avenir et flexible est indispensable, en particulier en ce qui concerne le profilage. À défaut, le projet rendrait un mauvais service à la recherche et à l’innovation suisses.
En ce qui concerne la loi sur l’expropriation, il reste à espérer que les deux Chambres se mettent d'accord sur la solution la plus équitable. Il s’agit de la solution qui accorde des indemnités identiques à tous les expropriés. Un traitement privilégié des terres cultivables renchérirait les infrastructures publiques et privées – sans améliorer la protection des terres cultivables.
Le Conseil fédéral soumet également aux deux Chambres son rapport sur la politique extérieure, y compris quatre arrêtés fédéraux visant à approuver des accords internationaux. economiesuisse soutient les arrêtés fédéraux, en particulier celui relatif à l’approbation de l’accord commercial entre la Suisse et le Royaume-Uni. Ce dernier contribue de manière importante à garantir les droits et devoirs actuels entre les deux pays.
Objets au Conseil national
Le Conseil national s'apprête à prendre des décisions importantes concernant la révision de la loi sur le CO2. Sa Commission de l'environnement lui recommande d'ouvrir, à toutes les entreprises l'accès aux conventions d'objectifs, ce qui est positif. L'économie répète depuis longtemps que, avec les bonnes conditions-cadre, elle pourrait accroître ses réductions des émissions de CO2 de 50% à 100%. Il est ennuyeux par contre que le projet du Conseil fédéral limite le potentiel de réduction en refusant que les entreprises ayant droit au remboursement bénéficient de la redistribution.
L’introduction d’un contrôle des investissements serait totalement déplacée. Il faut espérer que le Conseil national corrigera le tir et torpillera la «lex Chine» du Conseil des États. Le projet, à visée protectionniste, se fonde sur des prévisions erronées relatives à un faux problème. Les rachats d’entreprises suisses ne sont pas une menace pour la sécurité et l’ordre publics – idem pour les investissements chinois. À cela s’ajoute que les investissements directs étrangers sont importants. Ils créent des emplois, génèrent des recettes fiscales et des capitaux dont les entreprises ont besoin. En rejetant le projet, on évite aux entreprises non seulement des charges financières et administratives supplémentaires, mais également des risques.
Maintenir les droits de douane sur les produits industriels n’est pas non plus une bonne idée. En refusant d’entrer en matière, la commission bloque des allègements financiers et administratifs pour les entreprises suisses et soutient, au final, l’îlot de cherté. Il serait dans l’intérêt des consommateurs et entreprises suisses que le Conseil national corrige sa décision, entre en matière sur le projet et l’accepte.
Nous espérons que le Conseil national prendra aussi le contre-pied de sa commission et entrera en matière sur la révision de la loi sur le blanchiment d’argent. Si la Suisse souhaite préserver sa place financière de premier plan à l’échelle internationale et sa réputation, elle a besoin d’un dispositif de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme complet et conforme aux exigences internationales et donc de la présente révision. L’un ou l’autre point contesté pourra être renvoyé au Conseil fédéral avec un mandat, à moins que des propositions soient refusées lors des délibérations détaillées. Cette procédure serait surtout avantageuse en termes de délai. En cas de refus d’entrer en matière, la Suisse perdra inutilement du temps avant d’adapter sa législation. Cela n’est pas souhaitable.
Il faut espérer aussi que la Chambre basse soutiendra la décision du Conseil des États en ce qui concerne la loi sur le traitement fiscal des sanctions financières. Après des années de discussions pour élaborer une solution pragmatique, le projet sur la table a le mérite d’être acceptable au yeux de l’économie.
L’économie soutient par ailleurs la proposition autorisant les cantons à décider eux-mêmes d’un gel des admissions de médecins lorsque les coûts augmentent à un rythme supérieur à la moyenne. Elle rejette par contre l’introduction de chiffres minimaux et maximaux au niveau cantonal.
Il faut absolument éviter la création d’un fonds de numérisation hors du budget fédéral et son alimentation par une partie des recettes. Le précédent ainsi créé permettrait ensuite de justifier une approche analogue pour toutes les autres tâches. Toute évolution dans ce sens n’est pas souhaitable, car elle limiterait encore plus la gérabilité politique – déjà restreinte – du budget fédéral.
Le Conseil national examinera également deux initiatives populaires. Les milieux économiques sont opposés à l’initiative «Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre» ainsi qu’à l’initiative «Stop à l’îlot de cherté – pour des prix équitables». Nous vous recommandons de refuser d’entrer en matière sur le contre-projet indirect à l’initiative «Pour des prix équitables». Aucun de ces deux projets ne contribuerait à faire baisser le niveau des prix en Suisse. La première initiative constituerait une solution unique au monde. Elle entraînerait une grande insécurité juridique et soulèverait des questions de délimitation difficiles – et ce sans effets positifs.
Projets au Conseil des États
Le Conseil des États examinera, entre autres, les ultimes divergences pour la révision du droit de la S.A. (projet 1). Ces divergences sont cruciales pour l’économie. Il importe de refuser des durcissements inutiles, comme l’introduction d’un secret sur la manière dont le représentant indépendant exerce son droit de vote. Cela vaut aussi pour les règles qui visent à transposer dans la loi l’ordonnance contre les rémunérations abusives dans les sociétés anonymes cotées en bourse (ORAb). economiesuisse a suivi l’évolution du projet de près et s’est exprimée à plusieurs reprises sur des points décisifs.
De plus, la Chambre haute se penchera sur deux initiatives cantonales portant sur l’accord de libre-échange avec le Mercosur. La demande de l’une est déjà satisfaite (19.313) et l’autre empêcherait la conclusion d'un accord équilibré (19.302). Les milieux économiques les rejettent. En effet, un meilleur accès aux marchés du Brésil, de l’Argentine, de l’Uruguay et du Paraguay est important pour l’économie suisse. D’après des experts, l’accord permettrait aux entreprises suisses de réduire leurs dépenses au titre des droits de douane de 180 millions de francs par an, ressources qui pourraient dès lors être investies en Suisse.
Et, enfin, il est question de revoir totalement la loi sur coopération et la mobilité internationales en matière de formation. economiesuisse salue ce projet. Il faut espérer que le Conseil des États accepte que les solutions autonomes de la Suisse soient mises sur un pied d’égalité avec la participation à des programmes de formation européens. Il est judicieux de séparer la coopération et la mobilité internationales en matière de formation de la participation à des programmes de formation européens. Cela crée des bases légales permettant aux étudiants de Suisse d’effectuer un échange international indépendamment d’une éventuelle participation à Erasmus.
Les deux Chambres
L’ÉCONOMIE SOUTIENT LE COMPROMIS COORDONNÉ À l’ÉCHELLE INTERNATIONALE DU CONSEIL DES ÉTATS
L’initiative populaire 17.060 «Entreprises responsables – pour protéger l’être humain et l’environnement» charge la Confédération de prendre des mesures légales contraignant les entre-prises à faire preuve d’une diligence raisonnable étendue fondée sur les risques, afin que les droits humains internationalement reconnus et les normes environnementales internationales soient respectés. Cette obligation vaudrait pour toutes les relations d’affaires des entreprises suisses et serait mise en œuvre au moyen d’une responsabilité indépendante de la faute avec renversement du fardeau de la preuve pour les tiers contrôlés juridiquement et économiquement.
Au terme des délibérations des deux Chambres, le projet 2 de la révision du droit de la société anonyme (16.077) contient deux concepts pour un contre-projet indirect à l’initiative «Entreprises responsables». La proposition du Conseil national est proche des mécanismes de l’initiative, car elle avait été soumise initialement pour permettre à ses auteurs de la retirer. Le Conseil national a ajouté un al. 1bis à l’art. 55 CO sur la responsabilité de l’employeur. Les entreprises sont responsables des dommages occasionnés par les sociétés qu’elles contrôlent en cas d’atteinte aux droits de l’homme et aux normes environnementales dans l’exercice de leurs activités professionnelles ou commerciales. La responsabilité porte sur des atteintes à l’intégrité corporelle, à la vie et à la propriété.
Sont responsables les entreprises qui, en vertu de l’art. 716abis CO (nouveau), sont contraintes de respecter les dispositions sur la protection des droits de l’homme et de l’environnement aussi à l’étranger. Ce sont notamment les entreprises qui, pendant deux exercices consécutifs, affichent un total du bilan de 40 millions de francs, un chiffre d’affaires de 80 millions de francs et comptent 500 postes équivalents temps plein en moyenne annuelle. Les entreprises ne sont pas tenues pour responsables si elles apportent la preuve qu’elles ont pris les mesures requises pour protéger les droits humains et l’environnement et éviter le dommage. Elles ne sont pas non plus tenues pour responsables lorsqu’elles n’ont pas pu influencer l’entreprise contrôlée impliquée dans les atteintes à la législation invoquées.
Le deuxième concept a été développé par le Conseil des États pendant la session d’hiver 2019 sur la base d’une proposition du Conseil fédéral. Il se fonde sur des réglementations étrangères, en particulier celle de l’UE, et mise sur une obligation de reporting étendue pour les grandes entreprises. Cette obligation est complétée par des obligations de diligence raisonnable spécifiques en matière de travail des enfants et de minerais issus de zones de conflit.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande de soutenir la minorité Bregy et donc le contre-projet du Conseil des États. Il convient par contre de rejeter l’initiative populaire, extrême, ainsi que le contre-projet du Conseil national – qui équivaut de facto à une loi d’application.
Le contre-projet du Conseil des États se fonde sur une combinaison d’instruments éprouvés à l’échelle internationale et acceptables pour les entreprises. Il est tourné vers l’avenir et cible précisément les défis existant sur les marchés mondiaux. À titre de comparaison, le contre-projet du Conseil national reprend de l’initiative presque tous les mécanismes problématiques en matière de responsabilité. Il représente une solution unique au monde, non coordonnée à l’échelle internationale et accroissant massivement les risques d’actions en justice abusives et de chantages au procès par des concurrents, des études d'avocat étrangères ou des États voyous.
Contre-projet du Conseil des États: un compromis coordonné à l’échelle internationale et acceptable
Au terme de deux années de discussions intensives, le Conseil des États a approuvé, en décembre 2019, un contre-projet incisif, qui n’expose pas les entreprises suisses (quelle que soit leur taille) à des risques de chantages au procès, n’affaiblit pas la place économique et ne produit pas un effet contraire à celui escompté dans les pays concernés. Il s'agit d’un deuxième contre-projet qui va loin mais reste acceptable pour l’économie grâce à la coordination internationale. Celui-ci permet au Conseil national de suivre la Chambre haute et de recommander aux citoyens suisses de refuser une initiative «Entreprises responsables» dommageable.
La proposition du Conseil des États constitue un vrai compromis. En intégrant les réglementations étrangères les plus incisives et même des dispositions qui vont au-delà sur la diligence raisonnable en matière de travail des enfants, il donne une réponse crédible et acceptable aux défis internationaux. Les nouvelles obligations de diligence raisonnable proposées sont clairement définies et impliquent pour les entreprises d’examiner l’ensemble de leurs processus de création de valeur, de l’achat de matières premières à la production et la consommation, pour identifier d’éventuels risques en ce qui concerne le travail des enfants et l’utilisation de minerais provenant de zones de conflit. Cela place les entreprises suisses face à des défis et pourtant l’économie accepte de s’engager sur cette voie et de continuer à jouer son rôle de modèle.
Contre-projet du Conseil national: de facto une loi d’application de l’initiative populaire
Le contre-projet du Conseil national reprend directement les éléments les plus dangereux de l’initiative, à savoir l’inversion problématique du fardeau de la preuve au détriment des entreprises en Suisse, ses obligations de diligence raisonnables à la fois floues et étendues et, enfin, un vaste champ d’application. Il crée un nouveau for juridique en Suisse et permet ainsi à des plaignants étrangers de profiter des avantages de notre procédure civile, dont en particulier la gratuité des procédures en l’absence de moyens. Le prix à payer par les petites et grandes entreprises implantées en Suisse pour obtenir un retrait de l’initiative est excessif.
Le contre-projet du Conseil national reprend directement les éléments les plus dangereux de l’initiative, à savoir l’inversion problématique du fardeau de la preuve au détriment des entreprises en Suisse, ses obligations de diligence raisonnables à la fois floues et étendues et, enfin, un vaste champ d’application. Il crée un nouveau for juridique en Suisse et permet ainsi à des plaignants étrangers de profiter des avantages de notre procédure civile, dont en particulier la gratuité des procédures en l’absence de moyens. Le prix à payer par les petites et grandes entreprises implantées en Suisse pour obtenir un retrait de l’initiative est excessif.
État des délibérations
Dans le cadre de l’élimination des divergences, le Conseil national examinera à nouveau le contre-projet indirect à l’initiative «Entreprises responsables» pendant la session de printemps 2020. Ce contre-projet et l’initiative populaire (17.060) doivent absolument être soumis au vote final à la session de printemps si nous voulons maintenir la possibilité d’un retrait conditionnel de l’initiative.
La Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-N) s’est exprimée par 14 voix contre 5 et 6 abstentions pour le maintien du contre-projet indirect du Conseil national. La minorité Bregy soutient toutefois le Conseil des États. Elle fait remarquer que le contre-projet indirect du Conseil national revient pour ainsi dire à mettre en œuvre l’initiative. Elle estime en revanche le contre-projet du Conseil des États, fondé sur le projet du Conseil fédéral, équilibré et considère qu’il rapproche le droit suisse du niveau européen d’une manière acceptable pour l’économie. Ce contre-projet permet de tenir compte des principales préoccupations de l’initiative.
UNE LOI COORDONNÉE À L’ÉCHELLE INTERNATIONALE ET SUPPORTABLE ADMINISTRATIVEMENT EST DÉCISIVE POUR L’ÉCONOMIE SUISSE
Le Conseil fédéral soumet au Parlement la révision totale de la loi fédérale sur la protection des données (LPD) et la modification d’autres lois fédérales. Ce faisant, il poursuit deux objectifs principaux: adapter la protection des données aux développements technologiques et tenir compte du développement législatif à l’échelle internationale. Le règlement européen sur la protection des données (RGPD) s’applique ainsi depuis le 25 mai 2018.
Dans les faits, l’UE crée une nouvelle norme internationale en matière de protection des données qui comporte des aspects extraterritoriaux et touche aussi la Suisse. D’autres pays, dont le Japon, ont aussi adapté leurs lois. L’économie a donc tout intérêt à ce que la Suisse soit perçue comme un pays possédant une réglementation en matière de protection des données comparable avec cette nouvelle norme et adéquate, afin de ne pas subir de désavantages compétitifs. La circulation des données sans entraves entre la Suisse et l’UE – ainsi que les autres pays s’orientant à cette norme – dépend de l’équivalence reconnue des niveaux de protection dans les différents territoires. En plus de l’adaptation de la loi sur la protection des données, l’adhésion à la convention 108 du CE sur la protection des données – dont la Suisse ne peut pour l’heure pas se prévaloir selon l’UE – est, elle aussi, indispensable pour que l’UE la juge équivalente.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande de débattre du projet sur la base des travaux de la commission du Conseil national en tenant compte des recommandations de l’économie.
Une loi supportable sous l’angle administratif sans «Swiss finish»
Les recommandations des milieux économiques ont pour objectif d’aboutir à une loi supportable sous l’angle administratif. Le projet ne doit contenir aucune prescription qui n’est pas nécessaire dans la perspective de l’adéquation, qui n’apporte pas une plus-value aux personnes concernées ou qui va au-delà des exigences de l’UE («Swiss finish»). Les recommandations des milieux économiques ont été élaborées avec l’aide d’experts issus de toutes les branches de l’économie, tiennent compte de la systématique législative et forment un tout coordonné.
Aux yeux des entreprises, les divergences ci-après sont particulièrement importantes:
- Réglementation novatrice du profilage: Le pôle suisse de la recherche et de l’innovation ainsi que l’économie ont besoin d’une solution de profilage praticable. Ce domaine voit d’importantes évolutions technologiques en matière de gestion des données. La version du Conseil national, novatrice, offre une souplesse appropriée tout en assurant une protection proportionnée (soutien de la majorité de la CIP-N). Le Conseil des États avait proposé une distinction entre «profilage» et «profilage à risque élevé» (projet d’art. 4, let. fbis LPD) et, de surcroît, lié cette définition à des dispositions durcissantes (projets d’art. 5, al. 7 et d’art. 27, al. 2, let. c, ch. 1 LPD). Les règles européennes ne prévoient pas cette distinction. Cela représenterait un «Swiss finish» inutilement incisif sur un point fondamental sous l’angle du traitement des données et donc pour la place économique suisse. Avec la formulation proposée par le Conseil des États, toutes les formes de profilage constitueraient de fait un «profilage à haut risque». Distinguer des catégories de risque durcirait le régime au détriment des entreprises suisses. Sur la question du profilage, nous vous recommandons de soutenir la version du Conseil national.
- Prolonger la durée d’utilisation pour l’évaluation de la solvabilité, sans imposer la détermination de l’âge (projet d’art. 27, al. 2, let. c, ch. 3 et ch. 4 LPD): Les actes de défaut de bien se prescrivent après 20 ans. Afin d’harmoniser la durée d’utilisation des données personnelles sur lesquelles se fondent l’évaluation de la solvabilité avec les délais prévus dans le code civil, le Conseil national avait porté le délai proposé dans le message de cinq à dix ans. En accord avec le Conseil national et la majorité de CIP-N, il doit rester possible d’utiliser de telles données pour évaluer la solvabilité d’une personne, même si elles datent de plus de cinq ans. Le Conseil des États a raccourci ce délai à cinq ans sans nécessité. Le délai de dix ans souhaité par le Conseil national et la majorité de CIP-N est plus juste. D’après le Conseil fédéral et le Conseil des États, la justification d’une évaluation de la solvabilité ne devrait avoir effet que si, entre autres, la personne concernée est majeure. Dans la pratique, il est souvent impossible de déterminer l’âge exact d’une personne et, par conséquent, de s’assurer qu’elle est majeure. Il convient donc, ici également, de suivre la version du Conseil national et la minorité de la CIP-N.
- Introduction d’un privilège de groupe (projets d’art. 18, al. 3, let. c en rel. avec al. 4; art. 24, al. 2, let. a en rel. avec al. 2bis et art. 27, al. 2, let. b LPD): Les majorités de la CIP-N concernant le privilège de groupe sont à saluer. Elles créent, pour les groupes d’entreprises, les conditions leur permettant de se prévaloir de certaines dispositions d’exception. Cette possibilité n’était pas prévue dans la version du Conseil fédéral, ce qui contredisait les obligations légales faites aux groupes d’entreprises dans la pratique.
Harmonisation à l’échelle mondiale
L’économie suisse, qu’il s’agisse de grandes ou de petites entreprises, a tout intérêt à ce que la Suisse intègre de manière appropriée les évolutions internationales dans la législation sur la protection des données. Il est dans l’intérêt de la Suisse que l’UE la considère comme un pays comparable doté d’une réglementation adéquate, car si ce n’est pas le cas, il faudrait s’attendre à des complications dans les affaires courantes de nos entreprises. En effet, si la Suisse ne met pas en place un niveau de protection des données suffisant par rapport à l’UE, celle-ci la considérera comme un État tiers doté d’une réglementation insuffisante. Cela signifie aussi qu’il faut utiliser judicieusement l’actuelle marge de manœuvre en transposant le nouveau niveau de protection des données, dans l’intérêt de notre place économique. Les recommandations de l’économie veulent démontrer cette marge de manœuvre.
Bouclage rapide du projet, sans retards inutiles
L’UE examine actuellement toutes les décisions d’adéquation avec des États tiers et donc aussi la législation suisse sur la protection des données. Un rapport correspondant sera publié au mois de mai. Des reports inutiles de la révision suisse pourraient avoir pour effet que la Suisse, en raison de sa proximité géographique (comme la Grande-Bretagne d’ailleurs) apparaisse dans la mire de l’UE. Mettre la révision sous toit dans les meilleurs délais (session de printemps 2020) doit rester l’objectif. Il importe que les ordonnances nécessaires pour la révision de la LPD suivent rapidement, afin que l’économie ait suffisamment de temps pour les mettre en œuvre.
État des délibérations
Après les premières délibérations des deux Conseils, le projet est à présent examiné dans le cadre du processus d’élimination des divergences. Les deux Chambres traiteront de nouveau cet objet lors de la session de printemps 2020, en commençant par le Conseil national. Concernant le profilage, la CIP-N tient à la divergence par rapport à la Chambre haute. La majorité de la commission a décidé de suivre la solution libérale du Conseil national et de rejeter la proposition du Conseil des États prévoyant une distinction entre «profilage» et «profilage à risque élevé». Une minorité de la commission a appuyé la solution du Conseil des États, une autre une troisième solution mettant l’accent sur la création de données personnelles sensibles.
La CIP-N demande en outre à son plénum de retenir la décision de la Chambre basse sur plusieurs autres points. L’utilisation de données personnelles pour vérifier la solvabilité resterait, par exemple, possible pendant dix ans. La CIP-N demande aussi à son plénum de suivre la Chambre haute sur plusieurs points. Le cas spécial des groupes d’entreprises est également pris en compte.
UNE INDEMNISATION ACCRUE EN CAS D’EXPROPRIATION DE TERRES AGRICOLES EST DÉPOURVUE DE FONDEMENTS CONSTITUTIONNELS ET CRÉE DES INCITATIONS INOPPORTUNES
Le Conseil fédéral propose de réviser la loi sur l’expropriation (LEx). La pièce maîtresse du projet est l’adaptation des dispositions procédurales (grâce à une meilleure coordination de la procédure d’expropriation avec celle d’approbation des plans). Afin de préserver le bon fonctionnement des processus, le projet adapte et simplifie aussi des dispositions relatives à l’organisation et à la structure des commissions fédérales d’estimation (CFE). Le Conseil fédéral saisit cette occasion de moderniser des réglementations détaillées.
Position d'economiesuisse
En ce qui concerne le projet d’art. 19, let. abis LEx, economiesuisse recommande de soutenir la minorité II et donc de refuser une indemnisation excessive des terres agricoles.
Traitement spécifique des terres agricoles: contraire à la constitution
Dans son message, le Conseil fédéral a rejeté, après un examen approfondi, la demande de traitement spécial des expropriations de terres cultivables (exigé par la motion Ritter 13.3196). Il fait remarquer que les bases constitutionnelles s’appliquant en matière de droit d’expropriation sont insuffisantes. Le droit d’expropriation interdit de réaliser des bénéfices (du côté de l’expropriant comme de l’exproprié). Il convient ainsi de respecter le principe de l’égalité devant la loi et l’interdiction de l’arbitraire. L’art. 19 lit. abis porte atteinte à ces principes.
Surcoûts importants pour l’économie et les pouvoirs publics
Le projet d'art. 19, let. abis risque d’entraîner d’importants coûts supplémentaires dans le domaine des infrastructures. Du côté des pouvoirs publics, la construction d’infrastructures routières notamment nécessiterait un financement supplémentaire. Dans le secteur privé, les acteurs touchés seront les opérateurs de télécommunication, les fournisseurs d’énergie, le tourisme et d’autres acteurs intervenant en dehors des zones à bâtir. L’indemnisation de droits de passage serait spécialement affectée, suscitant des surcoûts considérables pour les entreprises concernées. Cela est d’autant plus ennuyeux qu’un droit de passage n’empêche quasiment jamais l’exploitation de terres cultivables, contrairement à une expropriation matérielle.
Précédent de mauvais aloi pour le droit d’expropriation cantonal
L’indemnisation supérieure prévue dans le projet d’art. 19abis crée une discrépance problématique entre les procédures d’expropriation selon le droit cantonal ou fédéral. Les montants versés par la Confédération seraient en effet plus élevés, avec des incitations inopportunes à la clé. Si les cantons adaptent leur législation au droit fédéral, cela équivaudrait à un changement de paradigme radical sans évaluation de son impact.
Pas d’amélioration de la protection du paysage
L’argument de la protection est hors de propos dans le cas présent. D’une part, l’instrument adéquat en la matière n’est manifestement pas la loi sur l’expropriation, mais clairement la loi sur l’aménagement du territoire. D’autre part, l’expropriation est une exception au niveau fédéral en ce sens que la grande majorité des cas sont réglés à l’amiable. Une indemnisation supérieure ne ferait qu’encourager une escalade des discussions relatives au droit d’exproprier des propriétaires de terres agricoles. Cela alourdirait les coûts économiques sans réduire l’utilisation des terres cultivables.
État des délibérations
Le projet se trouve au stade de l’élimination des divergences. Pendant la session de printemps 2020, ce sera au tour du Conseil national de l’examiner encore une fois. Contrairement au projet du Conseil fédéral, les Chambres fédérales ont décidé en première lecture de relever les indemnités pour les terres agricoles. Elles ne sont toutefois pas encore d’accord sur le montant de ladite indemnité. Une minorité de la Commission des affaires juridiques du Conseil national propose de maintenir une indemnité de six fois le prix maximal selon la loi fédérale sur le droit foncier rural (LDFR), alors qu’une majorité (14 voix contre 11) suit le Conseil des États et fixe l’indemnité à trois fois le prix maximal. Une deuxième minorité propose de biffer l’article concerné.
L’ACCORD AVEC LE ROYAUME-UNI GARANTIT LA POURSUITE DES RELATIONS COMMERCIALES APRÈS LE BREXIT
Le Conseil fédéral a adopté le 15 janvier 2020 le rapport sur la politique économique extérieure 2019, lequel soumet au Parlement quatre arrêtés fédéraux portant approbation d’accords internationaux. Concrètement, il s’agit d’un accord commercial de la Suisse avec le Royaume-Uni, d’un accord agricole de la Suisse avec Israël, de la modification (protocole A) de l’accord de libre-échange entre les États de l’AELE et Israël, d’un accord avec la Turquie dans le cadre du système généralisé de préférences ainsi que de plusieurs mesures tarifaires.
L’accord commercial avec le Royaume-Uni signé le 11 février 2019 est particulièrement important pour la Suisse, car il permet de maintenir des relations économiques avec le Royaume-Uni après sa sortie de l’UE. Il évite un vide juridique, ce qui est dans l’intérêt de la Suisse. Cet accord commercial réplique autant que possible les droits et devoirs économiques et commerciaux selon l'accord actuel Suisse-UE. Il déploiera son effet aussitôt que l'accord actuel ne sera plus applicable.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande d’approuver les quatre arrêtés fédéraux et plus particulièrement celui concernant l’accord commercial entre la Confédération suisse et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, y compris l’accord additionnel en vue d’étendre à la Principauté de Liechtenstein certaines dispositions de l’accord commercial.
L’accord commercial garantit les relations contractuelles et offre la sécurité juridique
Depuis le 1er février 2020, le Royaume-Uni n'est plus formellement membre de l’UE. La période transitoire négociée dans l’accord de sortie garantit certes que les accords bilatéraux de la Suisse avec l’UE s’appliquent au Royaume-Uni jusqu’à fin 2020 au moins, mais de grandes incertitudes perdurent pour la période qui suit. Dans ces conditions, l’accord commercial bilatéral signé le 11 février 2019 apporte une contribution de taille à la garantie des droits et devoirs existants entre la Suisse et le Royaume-Un. Avec un volume commercial de 38 milliards de francs actuellement (biens et services) et des investissements directs suisses de 78 milliards de francs environ, le Royaume-Uni est un des principaux partenaires économiques de la Suisse à l’échelle mondiale. La Suisse est également un partenaire commercial important pour le Royaume-Uni.
Combler les lacunes et intensifier les relations économiques
L’accord commercial signé présente toutefois des lacunes par rapport au statu quo. La poursuite en bilatéral de l’accord sur les obstacles techniques au commerce (MRA) est prévue uniquement pour trois domaines: les «Véhicules à moteur», les «Bonnes pratiques de laboratoire (BPL)» et l’«Inspection des bonnes pratiques de fabrication (BPF) des médicaments et certification de lots». La poursuite du MRA pour les 17 autres domaines (Medtech, chimie, machines, textiles/habillement, par exemple) dépend des modalités des futures relations entre l’UE et le Royaume-Uni. Au vu de la forte intégration des entreprises suisses dans des chaînes de valeur européennes, des solutions contractuelles bilatérales différentes entre la Suisse et le Royaume-Uni créeraient des complications et ne seraient pas efficaces. De même, il est important de combler les lacunes le mieux possible et au plus vite.
L’accord commercial prévoit en outre des discussions exploratoires pour le développement des relations commerciales bilatérales. Les milieux économiques saluent explicitement cet accord, dans la mesure où l’accord de libre-échange avec l’UE, de 1972, est un accord de première génération et qu’il présente un potentiel d’amélioration substantiel pour les entreprises exportatrices (services et propriété intellectuelle, par exemple). Il importe donc de faire avancer et de formaliser les discussions en vue d’une intensification des relations bilatérales rapidement et en impliquant étroitement les milieux économiques.
État des délibérations
Au cours de la session de printemps 2020, le rapport sera soumis aux deux Chambres pour information et les quatre arrêtés fédéraux pour approbation. Au vote d’ensemble, les Commissions de politique extérieure des deux Chambres ont recommandé, à l’unanimité, d’approuver tous les accords ainsi que les mesures tarifaires.
Appréciation des délibérations
Le Conseil national a approuvé, par 190 voix contre 0 et une abstention, l’accord commercial entre la Suisse et le Royaume-Uni. Le plébiscite de la Chambre basse en faveur de cet accord est réjouissant car il garantit le maintien des relations bilatérales commerciales avec le Royaume-Uni après sa sortie de l’UE. Il évite un vide juridique, ce qui est dans l’intérêt de la Suisse.
L’approbation des trois autres arrêtés fédéraux est également positive (accord sur l'agriculture entre la Suisse et Israël, actualisation de l’accord de libre-échange entre les États de l’AELE et Israël et accord avec la Turquie dans le cadre du système généralisé de préférences).
Conseil national
UNE MISE EN ŒUVRE TENANT COMPTE DES BESOINS DE L’ECONOMIE EST CRUCIALE
La loi sur le CO2 en vigueur fixe la réduction des rejets de gaz à effet de serre jusqu’en 2020. Pour la période après 2020, le Conseil fédéral doit donc élaborer des propositions visant des réductions supplémentaires. En signant l’accord de Paris, la Suisse s’est engagée à réduire d’ici à 2030 ses émissions de gaz à effet de serre de 50% par rapport à 1990. Selon le projet du Conseil fédéral, trois cinquièmes au moins des réductions devront être réalisées en Suisse et deux cinquièmes au maximum à l’étranger.
Dans le cadre de la présente révision totale, le Conseil fédéral entend prolonger l’ensemble des mesures en vigueur. La taxe sur le CO2 devrait rester la pièce maîtresse de la politique climatique suisse. Elle prend la forme d’une taxe d’incitation sur les combustibles fossiles. Dans le domaine du bâtiment, le Conseil fédéral propose à terme d’abandonner les mesures promotionnelles (programme bâtiment) et de les remplacer par des normes d’émission de CO2. Dans le domaine des transports, il est prévu de renforcer les normes d’émission pour les nouveaux véhicules et une obligation de compensation pour les importateurs de carburants. Pour les entreprises, les mesures en vigueur seront poursuivies, avec le système d’échange des quotas d’émission (SEQE) et le remboursement de la taxe CO2 pour certaines entreprises qui ne participent pas au SEQE mais s’engagent à réduire leurs émissions. L’éventail des instruments sera complété par diverses mesures, tels le fonds de technologie, la promotion de la communication et de la formation dans le domaine climatique et des dispositions volontaires pour les marchés financiers.
Le Conseil fédéral estime que la révision de la loi se traduira par une diminution des émissions de 26,9 millions de tonnes d’équivalent CO2 au moins. Compte tenu des résultats déjà obtenus, les émissions devraient diminuer en Suisse de près de 18,5 millions de tonnes d’ici à 2030. Par ailleurs, le Conseil fédéral s’attend à ce que le passage à une économie faiblement émettrice de gaz à effet de serre se traduise par des effets de croissance et par une stimulation de l’innovation. En même temps, le Conseil fédéral admet toutefois que l’augmentation de la taxe sur le CO2 aura un effet négatif sur le produit intérieur brut.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande d’accepter le projet avec des modifications. Du point de vue de l’économie, des correctifs se révèlent nécessaires. Seule la mise en œuvre d’un projet favorable aux entreprises permettra à la place industrielle suisse d’éviter des handicaps concurrentiels.
Objectif à réaliser en Suisse: modéré et réaliste
economiesuisse soutient l’objectif de réduction des émissions de CO2 de 50% d’ici à 2030. La flexibilité est décisive à cet égard. Cette flexibilité peut être assurée avec un objectif de 50% à réaliser en Suisse (la moitié de l’objectif de réduction global). L’utilisation de mécanismes de marché internationaux fait partie intégrante de l’accord de Paris. Une coopération internationale permet d’associer la réduction de gaz à effet de serre avec la possibilité d’exporter de manière ciblée des produits et des technologies suisses. Nous sommes favorables à une restriction de l’objectif à réaliser en Suisse à 50%. Une part supérieure aurait un impact négatif sur la croissance économique et sur l’emploi en Suisse et irait à l’encontre de l’intérêt de l’économie dans son ensemble.
Maintenir la taxe sur le CO2 à son niveau actuel
La taxe sur le CO2 est actuellement fixée à 120 francs par tonne au maximum. Aussi la Suisse applique-t-elle aujourd’hui déjà une des taxes les plus élevées du monde. Le Conseil fédéral propose néanmoins de porter cette limite à 210 francs par tonne d’émission. Ceci affaiblirait la place industrielle suisse en comparaison internationale. Il y a un risque de délocalisation industrielle à l’étranger. Pour l’éviter, le montant maximal de la taxe devrait être maintenu à 120 francs la tonne d’émission. Cela préserverait la compétitivité des entreprises suisses face à la concurrence.
Ouvrir la voie à des conventions d’objectifs
Toutes les entreprises devraient disposer d’un accès sans entraves au système de conventions d’objectifs. La combinaison d’une taxe modérée et de la possibilité de s’engager à réduire les émissions par une convention d’objectifs permet d’obtenir le plus de réduction d’émissions, tout en préservant la compétitivité des entreprises. Toutes les dispositions limitatives doivent être biffées, car elles empêchent de concrétiser de précieuses économies dans les entreprises.
État des délibérations
Le projet se trouve au stade de l’élimination des divergences. Le Conseil national, deuxième Chambre délibérante, traite ce dossier à la session de printemps 2020.
Au vote d’ensemble, sa Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l'énergie (CEATE-N) l’a adopté par 18 voix contre 7. Elle soutient les principaux éléments du projet adopté par le Conseil des États, en particulier les objectifs de réduction, les seuils de CO2 pour les bâtiments, les exigences pour les véhicules, le fonds pour le climat et la taxe sur les billets d’avion.
Renforcer les conditions-cadre au lieu d’ériger des barrièrs protectionnistes
La motion charge le Conseil fédéral de créer des bases légales pour un contrôle des investissements directs étrangers dans des entreprises suisses. Concrètement, elle propose, entre autres, que le Conseil fédéral mette en place une autorité d’approbation chargée de contrôler les transactions visées.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande de refuser cette motion.
Les investissements étrangers sont bénéfiques pour la Suisse
Les investissements directs créent des emplois, génèrent des recettes fiscales et des capitaux dont les entreprises ont besoin. De plus en plus, les entreprises mènent des activités et font de la recherche au sein de réseaux transfrontières. C’est le cas de quelque 96 000 PME suisses tournées vers l’exportation. La prospérité, la compétitivité et l’innovation en Suisse ne dépendent toutefois pas d’une structure de propriété nationale des entreprises. La densification des réglementations relatives aux investissements étrangers à l’échelle mondiale exprime avant tout des motivations protectionnistes et de politique industrielle. Elle a entraîné un recul substantiel des investissements directs à l’échelle mondiale – y compris en Suisse (-50% depuis 2015). De nouveaux obstacles légaux affaibliraient par conséquent la place économique suisse dans un contexte difficile.
Analyse erronée d’un faux problème et velléités protectionnistes
Les derniers rachats d’entreprises ayant eu lieu en Suisse ne constituaient pas un danger pour la sécurité et l’ordre publiques. Cela vaut également pour les investissements chinois, qui ont représenté 3% seulement des rachats étrangers de 2014 à 2017 et ont fortement reculé depuis 2016 (-34% depuis 2016). Une intervention aussi importante dans la liberté économique et la garantie de la propriété ne se justifie pas sur le plan matériel.
De plus, la Suisse dispose déjà d’instruments légaux incisifs pour protéger de manière ciblée des infrastructures d’importance systémique et des entreprises importantes pour l’économie. Le droit de la concurrence prévoit un contrôle des fusions et la loi sur les bourses une obligation d’annoncer la prise de participations. De nombreuses infrastructures stratégiques sont d’ailleurs déjà aux mains des pouvoirs publics (dans les domaines de l’énergie et des télécommunications, par exemple). Aux yeux de l’opinion publique, des mesures s’imposent non pas pour les rachats légaux mais pour des actions situées en marge des dispositions légales (cyberattaques, vol de propriété intellectuelle, par exemple).
Plus de coûts, de bureaucratie et de risques pour la Suisse et les entreprises suisses
Un contrôle étatique des investissements n’est pas efficace. Les expériences faites dans d’autres pays confirment que le rapport coût-utilité est désavantageux (Australie, par exemple). Les charges administratives, énormes, entraînent des coûts supplémentaires importants pour les entreprises comme pour les autorités (augmentation de la bureaucratie en Suisse). Il faut également craindre des effets dissuasifs. La place économique suisse n’est pas irremplaçable. Sans compter que l’introduction d'un contrôle étatique des investissements ne manquera pas d’entraîner des réactions. Des partenaires commerciaux importants pourraient restreindre les activités d’investissement des entreprises suisses sur leurs marchés. Ce sont avant tout les PME suisses qui en feraient les frais. Les économies ouvertes avec un petit marché renoncent pour la plupart à un contrôle étatique des investissements.
L’égalité de traitement des investisseurs indigènes à l’étranger est souhaitable. Un vent de libéralisation souffle actuellement sur la Chine, par exemple. Introduire des mesures de contrôle unilatérales n’aboutirait pas à des conditions concurrentielles identiques – la Suisse n’a pas le poids politique nécessaire pour ce faire. Pour obtenir la réciprocité, il vaut mieux développer des instruments bilatéraux comme les accords de libre-échange. C’est le chemin qu’a emprunté l’UE. Elle n’introduit pas d’obligation de contrôler les investissements à son échelle.
État des délibérations
Le Conseil national, deuxième conseil, examinera cette motion pendant la session de printemps 2020. Sa Commission de l’économie et des redevances propose, par 15 contre 9, de rejeter cette motion. Une minorité souhaite disposer de moyens d’intervention dans l’éventualité d’investissements problématiques dans des entreprises sensibles sous l’angle de la sécurité. Lors de la session d’été 2019, le Conseil des États a accepté cette motion par 22 voix contre 18 et 2 abstentions.
Appréciation des délibérations
Les contrôles des investissements pour des motifs protectionnistes ne sont pas un instrument politique approprié pour une Suisse ouverte. Aux yeux des milieux économiques, il est des plus regrettable que le Conseil national ait accepté, par 96 voix contre 82 et 15 abstentions, l’introduction d'une autorité de contrôle étatique. Cela affaiblira durablement les investissements en Suisse.
Veuillez trouver ici notre appréciation détaillée.
L’INITIATIVE ET SON CONTRE-PROJET MANQUENT LA CIBLE DES BAISSES DE PRIX
L’initiative souhaite garantir l’achat non discriminatoire de biens et de services à l’étranger et empêcher les restrictions de concurrence causées par des pratiques d’entreprises puissantes sur le marché. Elle nécessiterait une adaptation de la loi sur les cartels. Le contrôle des abus selon la loi sur les cartels viserait toujours les entreprises puissantes sur le marché, mais également celles ayant une position dominante relative. Selon les initiants, ces entreprises pourraient notamment se voir obligées de fournir ou d’acheter des biens et des services à des conditions spécifiques aux entreprises qui dépendent d’elles.
L’initiative souhaite par ailleurs garantir un commerce en ligne non discriminatoire. Elle demande ainsi une interdiction du blocage de contenus internet par les fournisseurs en fonction de la localisation (blocage géographique privé).
Le contre-projet indirect du Conseil fédéral prévoit une adaptation de la loi sur les cartels et reprend le concept de pouvoir de marché relatif proposé dans l’initiative. Son application se limiterait toutefois aux mesures visant à cloisonner le marché suisse. La réglementation du Conseil fédéral ne couvrirait pas les états de fait concernant strictement le marché domestique. Le contre-projet indirect n’interdit pas le blocage géographique privé en raison de difficultés de mise en œuvre.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande, d'une part, de rejeter l’initiative populaire et, d’autre part, de ne pas entrer en matière sur le contre-projet indirect en suivant la minorité Walti. Ni le contre-projet selon le Conseil fédéral ni le contre-projet durci par la CER-N ne s’attaque au problème des prix élevés en Suisse.
Le contre-projet suit les mécanismes de l’initiative
L’initiative et le contre-projet indirect s’appuient sur des mécanismes sensiblement identiques. Au centre, il y a la création d’un droit pour une «entreprise suisse ayant un pouvoir de marché relatif» d’acheter des biens et des services auprès d’un prestataire étranger «ayant un pouvoir de marché relatif» aux conditions sur le marché concerné. Ni l’initiative ni le contre-projet, c’est une bonne nouvelle, ne demandent une obligation de livrer en Suisse ou une fixation des prix. Si le contre-projet selon le Conseil fédéral semble légèrement moins interventionniste que l’initiative, le contre-projet selon la CER-N va plus loin que celle-ci. Ni l’initiative ni les contre-projets, quelles que soient leurs modalités, n’atteindraient l’objectif visé de lutter contre ce qui est perçu comme «la Suisse, un îlot de cherté».
L’approche adéquate des autorités de concurrence est mise à mal
L’objectif premier de la loi sur les cartels est de protéger la concurrence et non les relations bilatérales entre les acteurs du marché. Or la notion de «pouvoir de marché relatif» proposée dans l’initiative ainsi que dans les différentes versions du contre-projet vise à protéger ces dernières. Cela ne saurait être la tâche des autorités de concurrence. Cette notion devrait au contraire intervenir dans un conflit de droit civil. Il faut donc se focaliser sur une mise en œuvre dans les procédures civiles. Les enquêtes de la COMCO doivent rester l’exception.
Ni l’initiative ni le contre-projet ne feraient baisser le niveau des prix
Ni le contre-projet ni l’initiative n’entraîneraient une baisse significative des prix en Suisse – le Conseil fédéral est d'accord avec cette appréciation. La suppression d’obstacles techniques au commerce et des baisses de droits de douane seraient plus efficaces et agiraient plus directement que les interventions proposées dans le droit des cartels. Surtout, les modifications proposées ne garantissent pas que d’éventuels avantages de prix ne soient simplement utilisés pour améliorer les marges bénéficiaires.
Blocage géographique: souvent une nécessité et non un outil pour cloisonner un marché
Selon la forme que prend une interdiction du blocage géographique, elle peut entraver des comparaisons de prix et donc la libre concurrence. Un blocage géographique peut s’imposer pour différentes raisons: des raisons réglementaires (produits financiers, pharmaceutiques, par exemple), la protection de droits (œuvres protégées par des droits d’auteur), des différences en matière de protection des consommateurs (garanties, obligations d’information, par exemple) ou des considérations pratiques et organisationnelles (gestion des retours, par exemple). La réglementation européenne citée en exemple prévoit d’ailleurs de nombreuses exceptions. Sans compter que le blocage géographique peut être appliqué uniquement en collaboration internationale. Contrairement à l’initiative, les contre-projets soumis en discussion ne prévoient pas de règles spéciales ni d’interdiction des blocages géographiques.
État des délibérations
Le Conseil national, premier conseil, examinera cette initiative populaire ainsi que le contre-projet indirect du Conseil fédéral pendant la session de printemps 2020. Sa Commission de l’économie et des redevances (CER-N) lui demande d’accepter le contre-projet indirect (12 voix contre 10 et 3 abstentions). Elle l’a cependant modifié et complété sur plusieurs points de manière qu’il se rapproche de l’initiative et va même au-delà sur de nombreux points. La CER-N recommande à son plénum de rejeter l’initiative (10 voix contre 6 et 9 abstentions).
UNE ACTION NON COORDONNÉE DE LA SUISSE CRÉE UNE INSÉCURITÉ JURIDIQUE ET EST DOMMAGEABLE POUR L’INDUSTRIE
L’initiative populaire prévoit d’interdire à la Banque nationale suisse (BNS), aux fondations et aux institutions de la prévoyance publique et de la prévoyance professionnelle le financement d’entreprises dont plus de 5% du chiffre d’affaires annuel proviennent de la production de matériel de guerre.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande de suivre le Conseil fédéral et la commission et donc de rejeter l’initiative populaire sans contre-projet.
Le but de l’initiative, œuvrer en faveur d’un monde pacifique, mérite notre soutien, c’est certain. Les milieux économiques considèrent toutefois que l’initiative adopte une approche inopportune et mise sur des instruments et des mesures qui ne sont ni efficaces ni coordonnés à l’échelle internationale. Au contraire, l’acceptation du projet aurait de nombreuses conséquences dommageables pour la place économique suisse.
Des questions de délimitation difficiles créent une grande insécurité juridique en particulier pour les PME
Une entreprise serait considérée comme un «producteur de matériel de guerre» dès lors que les activités concernées dépassent 5% de son chiffre d’affaires. L’interdiction concernerait donc de très nombreuses entreprises et soulèverait quantité de questions de délimitation. Sont concernées directement de grandes entreprises actives à l’échelle mondiale ayant notamment des activités importantes dans le domaine civil, comme des sociétés aéronautiques et de navigation spatiale. De nombreuses entreprises de taille moyenne qui agissent comme fournisseur de grandes entreprises pourraient aussi être concernées. Des PME suisses du secteur MEM, qui représentent un grand nombre d’emplois, pourraient être particulièrement touchées. À noter qu’on ignore ce qu’il adviendrait des biens pouvant être utilisés à des fins civiles et militaires, notamment en présence de modifications dynamiques qui devraient se refléter dans les seuils fixés.
L’indépendance de la BNS menacée
L’interdiction du financement d’entreprises considérées comme des producteurs de matériel de guerre demandée par l’initiative menacerait l’indépendance de la Banque nationale suisse (BNS). Celle-ci ne pourrait plus suivre sa stratégie de placement éprouvée et miser sur des actions et des fonds diversifiés sur la base des risques et des rendements. Or imposer des restrictions à sa politique de placement c’est affaiblir la BNS pour son mandat relatif à la stabilité des prix. Ce serait dommageable pour la place économique ainsi que pour la prospérité en général.
Des charges administratives massives affaibliraient les institutions de prévoyance et les investisseurs institutionnels
L’initiative aurait par ailleurs un effet négatif sur les rendements des investisseurs institutionnels comme l’AVS/AI, les caisses de pension et les fondations. De nombreuses formes de participation directe et indirecte aux entreprises mentionnées, comme les actions et les fonds, seraient interdites. Dès lors les exigences de l’initiative réduiraient l’univers de placement, ce qui alourdirait les coûts de gestion des portefeuilles des investisseurs institutionnels. Les charges administratives des prestataires de services financiers suisses pour l’examen et l’ajustement permanent des portefeuilles seraient immenses. Les investisseurs seraient donc contraints de désinvestir à contre-temps de leurs stratégies de placement durables et à long terme. Ces coûts supplémentaires inutiles induiraient des pertes de recettes du côté des institutions de prévoyance étatiques et privées et impacterait négativement leur situation financière. Des entreprises, en particulier des PME, pourraient devoir satisfaire des exigences accrues pour obtenir des crédits.
Une solution suisse unique au monde et non coordonnée resterait sans effet
En plus de ses nombreux défauts, l’initiative ne produirait pas l’effet escompté. D’une manière générale, une mesure dans le domaine du financement de l’industrie de l’armement limitée à la Suisse et donc non coordonnée à l’échelle internationale aurait un impact négligeable. Or il n’est pas question, dans le cadre des Nations unies ou d’autres organisations internationales, d’interdire mondialement des investissements dans les industries d’armement, ce que demande l’initiative. En cas d’acceptation de l’initiative, la Suisse cesserait de participer au débat international et devrait s’accommoder des conséquences négatives de sa décision, sans effets positifs en regard.
État des délibérations
Le Conseil national, premier conseil, examinera cette initiative populaire à la session de printemps 2020. Sa Commission de la politique de sécurité (CPS-N) lui propose, par 17 voix contre 8, de la rejeter. Elle refuse également, par 15 voix contre 10, le mandat d’élaborer une initiative de commission proposant un contre-projet indirect. La majorité de la commission relève que la Suisse a déjà introduit une interdiction de financement pour les armes atomiques, biologiques et chimiques ainsi que pour les armes à sous-munitions et les mines antipersonnel et que cette mesure a fait ses preuves. Elle estime par ailleurs que l’initiative n’atteindrait pas son objectif, c’est-à-dire interdire de financer des producteurs de matériel de guerre à l’échelle mondiale. Le Conseil fédéral recommande également de rejeter l’initiative sans contre-projet direct ou indirect.
LE CONSEIL NATIONAL DOIT ABSOLUMENT LES DÉCISIONS REGRETTABLES DE LA COMMISSION
Le projet propose de réduire à zéro les droits de douane sur les produits industriels importés à compter du 1er janvier 2022. Le terme de produits industriels couvre presque tous les biens à l’exception des produits agricoles (y compris les fourrages) et des produits de la pêche. Au-delà de la suppression unilatérale des droits de douane, le projet prévoit de simplifier la structure des droits de douane appliqués aux produits industriels.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande, à l’instar de la minorité de la CER-N, d’entrer en matière et d’accepter le projet.
Les milieux économiques soutiennent tant l’abolition des droits de douane sur les produits industriels que la simplification de la structure des tarifs douaniers. En particulier dans des périodes d’incertitude où l’économie suisse fait face à une augmentation des risques mondiaux, à une baisse des marges bénéficiaires et à une intensification de la concurrence internationale, les milieux politiques ont ainsi la possibilité d’améliorer efficacement et de manière autonome les conditions-cadre pour les entreprises suisses dans le contexte de la concurrence mondiale. La position prise par la CER-N en prévision des délibérations du Conseil national est regrettable. Si la Chambre basse souhaite sérieusement alléger les charges financières et administratives des consommateurs et des entreprises, c’est à elle de remettre le projet sur les rails.
Débarrasser les entreprises de coûts supplémentaires inutiles
À l’heure actuelle, les entreprises suisses paient quelque 500 millions de francs par an en droits de douane sur les produits industriels importés. Et ce, alors que 75% des droits de douane ont en principe été supprimés – dans le cadre d’accords de libre-échange bilatéraux. Il y a plusieurs raisons à cela. Parfois cela tient aux règles d’origine nécessaires pour obtenir l’exonération des droits de douane qui ne sont pas satisfaites, d’autres fois les charges administratives pour obtenir la preuve d’origine sont trop élevées par rapport aux économies possibles. Dans l’ensemble, au vu des mesures protectionnistes introduites par de nombreux pays, l’abolition des droits de douane sur les produits industriels est une mesure intéressante pour améliorer la compétitivité internationale de la place économique suisse.
Allègement des charges administratives de plus de 100 millions de francs
Outre la suppression de droits de douane, le projet mise sur un allègement des charges administratives, pour les entreprises et l’administration, à hauteur de plus de 100 millions de francs. Pas moins de 35% des importations de produits industriels en profiteront. Concrètement, cela signifie moins de formalités douanières, d’écritures comptables ou d’autorisations et la disparition de procédures douanières lourdes (trafic de perfectionnement, par exemple). Dans certains cas, il ne sera plus nécessaire d’obtenir des preuves d’origine. La suppression des droits de douane soulagera les entreprises, qu’elles produisent en Suisse ou pas et quelle que soit leur taille.
Baisse du niveau des prix et augmentation du revenu disponible pour les consommateurs
La suppression des droits de douane sur les produits industriels est un moyen efficace de lutter contre l’îlot de cherté suisse et présente des avantages pour les consommateurs. Au vu de la forte pression concurrentielle actuelle, on peut partir du principe que les entreprises répercuteront les baisses de coûts sur les clients finaux (habillement, chaussures, voitures ou cosmétiques, par exemple). Pour les ménages, cela entraînerait une économie de l’ordre de 350 millions de francs à l’échelle nationale. En même temps, la suppression des droits de douane augmentera la performance économique et donc les revenus. On estime qu’une famille de quatre personnes aurait 170 francs par an en plus en poche.
Inquiétudes injustifiées quant à un affaiblissement de la position de la Suisse dans des négociations de libre-échange
Pour les accords de libre-échange modernes, l’abolition des droits de douane joue un rôle secondaire – contrairement à la suppression des obstacles techniques au commerce et à la protection de la propriété intellectuelle. À cela s’ajoute que la Suisse a déjà conclu des accords de libre-échange avec de nombreux pays industrialisés. Enfin, des pays comme le Canada, la Norvège ou Singapour ont montré qu’il est possible de conclure des accords de libre-échange substantiels sans les droits de douane sur les produits industriels.
Une simplification du régime tarifaire le plus compliqué du monde attendue de longue date
Selon une comparaison du Forum économique mondial, la Suisse possède le régime tarifaire le plus compliqué du monde. Aussi les milieux économiques soutiennent-ils une simplification de la structure des tarifs à la faveur de l’abolition des droits de douane sur les produits industriels, ce qui serait avantageux en particulier pour les entreprises peu aguerries dans le domaine. Cela dit, le changement occasionnera des frais pour les entreprises. Afin de les contenir au maximum, il faut regrouper la modification de la structure des tarifs, la révision du système harmonisé et la mise en œuvre du projet visant à numériser les douanes suisses (DaziT). Il convient donc d’abolir les droits de douane sur les produits industriels au 1er janvier 2022.
Pour de plus amples informations, nous vous recommandons de lire notre dossierpolitique (09/2019; Lever les droits de douane sur les produits industriels? Tout le monde en profite?).
État des délibérations
Le Conseil national, premier conseil, examinera ce projet de loi à la session de printemps 2020. Une très courte majorité de sa Commission de l’économie et des redevances (12 voix contre 11 et une abstention) lui recommande de ne pas entrer en matière sur le projet. À ses yeux, les risques liés à ce projet sont trop grands et le bénéfice pour l’économie et les consommateurs insuffisant. Une minorité importante préconise cependant d’entrer en matière. Elle est convaincue que la suppression des droits de douane sur les produits industriels renforcerait la place économique suisse et la compétitivité des entreprises. Le projet aurait surtout l’avantage d’alléger les charges administratives de nombreuses entreprises, petites et grandes. Les baisses de prix attendues devraient réduire les dépenses des consommateurs.
LE FONDS DE NUMÉRISATION PRÉVU VA À L’ENCONTRE DE LA SYSTÉMATIQUE FINANCIÈRE
La motion charge le Conseil fédéral de soumettre au Parlement les bases légales nécessaires à la création d’un fonds de numérisation qui serait alimenté par les moyens provenant de l’attribution des fréquences de la 5G. La base légale préciserait les domaines dans lesquels il serait possible de demander des moyens provenant de ce fonds. Une partie de ces moyens devrait être allouée au domaine de la numérisation pour la création audiovisuelle en Suisse.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande de refuser cette motion.
Ne pas financer des tâches fédérales ordinaires par des recettes extraordinaires
La loi sur les finances de la Confédération règle très clairement l’utilisation des recettes extraordinaires. Les recettes comme celles résultant de l’attribution des fréquences de la 5G sont inscrites à titre de bonification dans un compte d’amortissement tenu hors du compte d’État (art. 17a LFC). Les dépenses admissibles selon le frein à l’endettement ne doivent pas être augmentées en tenant compte des recettes extraordinaires (art. 13 LFC). Ces dernières ne sont pas utilisées pour financer des tâches fédérales ordinaires.
La présente motion enfreint ce principe en soustrayant des tâches du budget fédéral et en les finançant par des moyens extraordinaires qui, en plus de n’avoir aucun lien avec la tâche ne sont pas destinés au financement du budget. Le projet fait fi de la systématique financière.
Créer un nouveau fonds n’est pas cohérent sur le plan budgétaire
Les dépenses que la motion veut financer par un nouveau fonds peuvent, en principe, être couvertes sans problème en puisant dans le budget fédéral normal – dès lors que le Parlement accorde les moyens nécessaires. Les raisons justifiant la création d’un fonds, notamment les concentrations de paiements irrégulières ou les recettes affectées, surtout dans le domaine du trafic, font défaut dans le cas présent.
Il faut absolument éviter la création d’un nouveau fonds hors du budget fédéral et son alimentation par une certaine partie des recettes. Le précédent ainsi créé permettrait ensuite de justifier une approche analogue pour toutes les autres tâches. Toute évolution dans ce sens n’est pas souhaitable, car elle limiterait encore plus la gérabilité politique – déjà restreinte – du budget fédéral. La tendance augmenterait de voir certaines tâches «privilégiées» être soustraites aux décisions parlementaires dans le cadre du processus budgétaire annuel. L’inégalité de traitement se creuserait entre, d’une part, les tâches bénéficiant de moyens réservés et fixés par la loi et, d’autre part, les tâches ne disposant pas de tels moyens.
État des délibérations
Le Conseil national, deuxième conseil, examinera cette motion pendant la session de printemps 2020. Sa Commission de la science, de l’éducation et de la culture (CSEC-N) l’a rejetée par 16 voix contre 9. La majorité relève que le financement d’un tel fonds ne serait pas garanti sur la durée et estime que le fonds ne produirait pas l’effet escompté. Une minorité préconise d’accepter la motion. Le Conseil des États a accepté le projet par 19 voix contre 13 à la session d’automne 2019.
Conseil des États
LE DURCISSEMENT DE L’ORAB ET L’INTRODUCTION D’UN SECRET POUR LE VOTE DU REPRÉSENTANT INDÉPENDANT AFFAIBLISSENT LA PLACE ÉCONOMIQUE SUISSE
Le Conseil fédéral entend moderniser le droit de la société anonyme et l’adapter aux besoins futurs des milieux économiques. Le projet de loi s’appuie sur la révision de 2013 qui avait été interrompue en raison du débat sur l’initiative Minder. Il simplifie les dispositions relatives à la création d’entreprise et au capital. Dans les cas les plus simples, les sociétés anonymes, les sociétés à responsabilité limitée et les coopératives doivent pouvoir être fondées et dissoutes sans officier public. De plus, la valeur nominale minimale des actions doit pouvoir être fixée de manière plus flexible.
Une des nouveautés est la transposition dans la loi de l’ordonnance contre les rémunérations abusives dans les sociétés anonymes (ORAb). Celle-ci met en œuvre l’initiative Minder, acceptée par le peuple et les cantons le 3 mars 2013. Après son acceptation (art. 95, al. 3 Cst.), le Conseil fédéral avait dû édicter dans une ordonnance les dispositions d’exécution nécessaires en l’espace d’un an.
La révision entend aussi mieux harmoniser les dispositions relatives à l’assainissement des entreprises avec la procédure de sursis concordataire. Un assainissement doit, si possible, être lancé avant l’ouverture d’un sursis concordataire formel. Le Conseil fédéral propose d’admettre que des litiges liés au droit de la société anonyme puissent être traités par une cour arbitrale. Le projet prévoit encore des dispositions en matière de transparence pour les entreprises actives dans l’extraction de matières premières. Ces dernières seront tenues de publier les versements en faveur de gouvernements. Cela vise à tenir compte des évolutions juridiques au niveau international.
Le Conseil fédéral propose, enfin, d’introduire des seuils de représentation de genre pour les entreprises cotées en Bourse. En vertu de ceux-ci, 30% de femmes et d’hommes au moins devraient siéger dans les conseils d’administration et 20% au moins dans les directions. Les entreprises ne respectant pas ces valeurs indicatives devraient se justifier dans le rapport sur les rémunérations et indiquer les mesures prises pour promouvoir le sexe le moins représenté.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande d’accepter le projet avec des modifications.
Une révision du droit de la société anonyme s’impose. Les points encore ouverts revêtent une grande importance pour l’économie. Un durcissement inutile de l’ordonnance contre les rémunérations abusives (ORAb) (art. 734e, art. 735a, al. 2, art. 735c, ch. 2bis et 2ter) et l’introduction d’un secret sur la manière dont le représentant indépendant exerce son droit de vote (art. 689c, al. 4bis CO) compromettent l’équilibre du projet. Il est regrettable que la CAJ-E recommande à son plénum de maintenir sa position initiale. Il revient au Conseil national de rectifier le tir au plus tard lors de la deuxième phase de l’élimination des divergences.
Non à un durcissement de l’ORAb
Lorsque l’ORAb est entrée en vigueur, les entreprises ont adapté leurs statuts ce qui a occasionné des frais et créé une insécurité internationale. Il est décisif pour l’économie d’éviter un nouveau durcissement de l’ordonnance, dans la mesure où cela entamerait sensiblement la sécurité juridique des entreprises et affaiblirait la Suisse en tant que site d’implantation. La Suisse possède déjà l’une des réglementations les plus poussées en matière de rémunération des membres du conseil d’administration et de la direction. Durcir le projet au-delà de l’ordonnance ne serait pas judicieux.
Non à un secret sur la manière dont le représentant indépendant exerce son droit de vote
Le Conseil des États a par ailleurs repris une disposition très problématique du point de vue de l’économie (art. 689c, al. 4bis CO). Un secret sur la manière dont le représentant indépendant exerce son droit de vote impliquerait un dangereux changement de paradigme. Non seulement cette disposition n’est pas efficace mais elle est même contre-productive puisqu’elle entrave une tenue efficace de l’assemblée générale. Elle modifierait radicalement et défavorablement l’attitude face aux actionnaires activistes. En cas d’acceptation, on risquerait de voir des événements imprévisibles et dommageables pour les entreprises et les actionnaires se produire lors des assemblées générales.
État des délibérations
Le projet se trouve au stade de l’élimination des divergences. Le Conseil des États l’examinera encore une fois pendant la session de printemps 2020. À l’instar du Conseil national lors de la session d’automne 2019, la Commission des affaires juridiques du Conseil des États a commencé à éliminer les divergences et s’est ralliée à la Chambre basse sur plusieurs points. Sur des points centraux qui tendent à durcir l’ORAb ou en lien avec l’introduction d’un secret sur la manière dont le représentant indépendant a exercé son droit de vote, la commission confirme la décision de son plénum sans proposer de décision minoritaire.
OUI À UNE POLITIQUE D’ENCOURAGEMENT FÉDÉRALE DYNAMIQUE
Le Conseil fédéral propose une révision totale de la loi du 8 octobre 1999 relative à la coopération internationale en matière d’éducation, de formation professionnelle, de jeunesse et de mobilité. Cette loi constitue toujours la base de la Confédération dans le domaine de la coopération internationale en matière de formation. Au cours des deux dernières décennies, elle a uniquement fait l’objet d’adaptations ponctuelles et disparates. L’une des raisons en est le changement répété du statut de la Suisse quant à sa participation aux programmes de formation européens, qui évoluent de manière dynamique.
Les pratiques d’encouragement actuelles montrent les limites du cadre légal en vigueur. Le fait de rattacher les principaux instruments d’encouragement à une participation aux programmes de formation européens n'est plus en adéquation avec l’internationalisation de la formation. La loi en vigueur ne prévoit pas un ancrage équivalent pour les deux instruments (l’association aux programmes d’encouragement internationaux et la mise en œuvre de programmes suisses). Même la possibilité de confier des tâches essentielles en matière de mise en œuvre à une agence nationale est subordonnée à une participation aux programmes européens. De plus, la loi ne contient pas d’indications essentielles sur le but et les principes de la politique d’encouragement. Pour ces différentes raisons, le Conseil fédéral estime une révision totale nécessaire.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande d’accepter le projet.
Ancrage équivalent de la participation à des programmes de formation et de la mise en œuvre de programmes suisses
Cette révision place sur un pied d’égalité la participation à des programmes de formation européens et la solution autonome élaborée par la Suisse. Elle sépare la coopération et la mobilité internationales en matière de formation de la participation à des programmes de formation européens. Du point de vue des milieux économiques, cette séparation est judicieuse. Elle crée des bases légales permettant aux étudiants de Suisse d’effectuer un échange international indépendamment d’une éventuelle participation à Erasmus.
Confier un mandat à la FPEM, en tant qu’agence nationale d’encouragement
La mise en œuvre de ce changement serait confiée à une agence de promotion nationale. Conformément aux explications, la Fondation suisse pour la promotion des échanges et de la mobilité (FPEM / Movetia), soutenue par la Confédération et les cantons, est la seule organisation à satisfaire les conditions requises pour assumer les tâches d’une agence de promotion nationale. Organisée actuellement en tant que fondation de droit privé, elle serait transformée en une institution de droit public. La future agence de promotion doit disposer de l’expertise et des capacités nécessaires mais aussi travailler si possible de manière efficace sous l’angle des coûts. Il convient donc de vérifier si un appel d’offres public est possible et judicieux. Il est également nécessaire d’examiner la transformation de la FPEM en une organisation de droit public, une idée à concrétiser uniquement si elle est pertinente. Cette question ne fait pas l’objet de la présente révision totale, mais sera traitée dans un projet séparé.
État des délibérations
Le Conseil des États, premier conseil, examinera ce projet pendant la session de printemps 2020. Sa Commission de la science, de l'éducation et de la culture (CSEC-E) lui propose, à l’unanimité, de l’accepter.
L’ÉCONOMIE TIENT À L’ACCORD AVEC LE MERCOSUR: IL EST ÉQUILIBRÉ ET AVANTAGEUX POUR LA SUISSE
L’initiative 19.302 du canton du Jura demande que les produits agricoles soient exclus de l’accord de libre-échange avec le Mercosur. Avec son initiative 19.313, le Grand Conseil du canton de Genève demande à l’Assemblée fédérale de permettre l’organisation d’un référendum facultatif sur le traité de libre-échange avec le Mercosur.
Position d'economiesuisse
economiesuisse recommande de ne pas donner suite à ces deux initiatives cantonales.
L’initiative cantonale 19.302 entraverait la ratification d’un accord équilibré
En août dernier, la Suisse, sous l’égide de l’AELE, a conclu un accord avec les États du Mercosur, à savoir le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay, en vue du développement de l’accès aux marchés. L’accord de libre-échange négocié couvre entre autres les produits agricoles. Dans ce domaine, il prévoit des contingents bas, fixés en accord avec des représentants du secteur agricole, de manière à ne pas évincer la production indigène. De plus, il contient des dispositions en matière de développement durable introduisant des obligations contraignantes afin de protéger le climat et de tendre à une utilisation durable des ressources forestières.
En cas d’acceptation de l’initiative cantonale 19.302, la Suisse ne pourrait pas ratifier l’accord – ce qui entraînerait des dommages considérables pour l’économie suisse. Non seulement l’accord supprime des obstacles au commerce importants avec un marché de 260 millions de consommateurs et une performance économique de plus de 2,5 billions de dollars US par an, mais il garantit également que les sociétés suisses ne seront pas discriminées par rapport à la concurrence européenne. Cela est d'autant plus important que l’UE a également négocié un accord l’été dernier. D’après des experts, l’accord permettrait aux entreprises suisses de réduire leurs dépenses au titre des droits de douane de 180 millions de francs par an, ressources qui pourraient dès lors être investies en Suisse.
Les exigences de l’initiative cantonale 19.313 sont déjà satisfaites
Conformément à l’art. 141 de la constitution, la conclusion et la modification d’accords internationaux sont soumises au référendum facultatif dès lors que les accords «contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou que leur mise en œuvre exige l'adoption de lois fédérales». Cet aspect s’applique aussi à des accords économiques importants. Selon un arrêté fédéral du 22 juin 2016, la pratique a évolué dans le sens que tous les accords de libre-échange, de protection des investissements et conventions de double imposition nouveaux ou actualisés sont nécessairement soumis au référendum facultatif. Cela vaut même lorsqu’aucune loi nationale ne doit être adaptée ou lorsque des traités internationaux correspondent, sur le plan du contenu, à de précédents accords (accord standard). Par conséquent, les exigences de l’initiative cantonale 19.313 sont déjà satisfaites.
État des délibérations
Le Conseil des États, premier conseil, examinera les deux initiatives cantonales pendant la session de printemps 2020. Sa Commission de politique extérieure (CPE-E), chargée de l’examen préalable, propose par 9 voix contre 2 et une abstention de ne pas donner suite à l’initiative du canton du Jura 19.302. La majorité estime en effet qu’un accord de libre-échange avec le Mercosur est dans l’intérêt de l’économie suisse. Sa Commission propose par 9 voix contre 2 et une abstention de ne pas donner suite à l’initiative du canton du Jura 19.302. Cependant, le conseiller fédéral Guy Parmelin a assuré la CPE-E que son Département de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) s’engagerait en faveur d’un référendum facultatif. Cela correspond en effet à la nouvelle pratique pour les accords standard que le Conseil fédéral a communiquée en août 2019.