Privatiser partiellement Ruag est juste!
Des miracles ont encore lieu à une époque où un nombre croissant d’États tendent vers le protectionnisme: le 18 mars, le Conseil fédéral a annoncé qu’il maintient sa décision de privatiser partiellement la société Ruag.
Cette décision ravive l’espoir de voir l’empreinte étatique diminuer à nouveau, après ce qui semble une éternité. Depuis la privatisation partielle de Swisscom en 1998, l’emprise de l’État n’a cessé de s’agrandir, ce qu’econmiesuisse a montré dans une vaste étude en 2014. Après les discussions en vue d’une privatisation, celles visant une libéralisation ont également échoué. Et, aujourd’hui, enfin un pas dans la bonne direction: La Confédération prévoit de se séparer des activités de Ruag axées de manière prépondérante sur la société civile. Les tâches d’entretien à l’égard de l’armée suisse resteraient, par contre, dans le giron de l’État.
Privatiser partiellement la Ruag est judicieux et ce pour trois raisons. Premièrement, le groupe technologique a fortement développé ses applications civiles ces dernières années. Il propose des produits et des services intéressants à une époque où la sécurité numérique devient un défi de taille également dans le secteur privé. Or des comités de surveillance étatiques ne sont guère en mesure de prédire les évolutions dans un environnement influencé par les technologies et changeant rapidement ni de poser les bons jalons. Ruag n’est, depuis longtemps, plus une PME. C’est désormais un groupe international avec 8700 collaborateurs qui réalise plus de la moitié de son chiffre d’affaires net hors de Suisse. Dès lors, le risque entrepreneurial est très grand, c’est la deuxième bonne raison de privatiser. Des investissements considérables à long terme sont nécessaires, notamment dans les applications civiles des domaines de l’espace et de l’aérospatial. Ces investissements peuvent porter leurs fruits ou non. Obliger les contribuables à assumer les conséquences de mauvaises décisions entrepreneuriales serait irresponsable. Troisièmement, une privatisation peut aussi éviter une instrumentalisation de Ruag dans la politique extérieure et des restrictions de ses activités via des prescriptions légales, par exemple.
Une privatisation partielle poserait les bons jalons pour la société Ruag, ce qu’il faut saluer. Les segments privatisés du groupe pourraient gagner en agilité sur le marché et seraient ainsi en mesure de relever les défis à venir. Il faut toutefois formuler une réserve de taille: Les segments de Ruag restant dans le giron de la Confédération ne doivent pas devenir un monopole échappant à la concurrence. L’expérience a montré que l’argument de la sécurité est souvent invoqué pour justifier la protection d’une entreprise face à la concurrence étrangère. Une interprétation erronée de la protection sécuritaire ne doit pas permettre de soustraire des segments de Ruag à la privatisation.