La BNS au service de notre pouvoir d’achat

85%: c’est le taux stratosphérique qu’a atteint l’inflation en Turquie en 2022. Entre-temps, elle est quelque peu redescendue et se situe aux alentours de 70%. En comparaison, l’inflation en Suisse a atteint 2,8% en 2022, et s’élevait à 1,4% sur un an en avril 2024. Bien sûr, il s’agit de deux cas extrêmes, puisque la Turquie a l’un des taux les plus hauts au monde, et la Suisse l’un des plus bas. Cela s’explique par une différence fondamentale entre les deux pays.

En Turquie, le pouvoir en place ne cesse d’interférer dans la politique monétaire de sa banque centrale, dont il n’hésite d’ailleurs pas à «démissionner» les gouverneurs qui ont l’ire de lui déplaire. La situation est heureusement totalement différente en Suisse. L’indépendance de notre Banque nationale suisse (BNS) est en effet garantie par la loi, et sa mission clairement définie: assurer la stabilité des prix en tenant compte de l’évolution de la conjoncture et conduire la politique monétaire dans l’intérêt général du pays. Maîtriser l’inflation est donc sa principale mission. Pour ce faire, elle peut être amenée à prendre des décisions impopulaires, comme relever les taux d’intérêt pour faire baisser les prix. Actuellement, le taux de référence de la BNS est de 1,5%. En Turquie, il vient de passer à 50%!

Les redistributions soumises à des règles strictes

Bien sûr, la BNS n’échappe pas aux pressions politiques – un jour pour qu’elle finance des avions de combat, un autre pour qu’elle finance l’AVS ou des investissements. Certains tentent même d’influencer sa politique d’investissement, pour qu’elle achète du bitcoin par exemple. Or la mission de la BNS n’est pas de générer des bénéfices pour financer des projets X ou Y. Il peut aussi arriver qu’elle essuie des pertes, comme ce fut le cas en 2022 et 2023. Dès lors, elle n’a pas pu procéder à des redistributions aux cantons et à la Confédération, la loi le lui interdisant. Et les règles sont strictes. Pour faire simple, les excédents et les réserves de la BNS doivent atteindre un certain seuil pour qu’elle puisse redistribuer de l’argent. Personne ne peut prédire si elle pourra le faire en 2025. Mais une chose est sûre: si la BNS peut remplir sa mission d’assurer la stabilité des prix, c’est parce qu’elle est indépendante et peut agir sans céder aux sirènes des intérêts politiques ou idéologiques partisans. Au final, c’est la population qui est gagnante, puisqu’assurer la stabilité des prix, c’est préserver le pouvoir d’achat des Suisses.

Cet article a été publié le 21 mai 2024 dans le journal «La Région».