Investissements étrangers: un facteur de réussite plutôt qu’un danger pour notre économie
- Introduction L’essentiel en bref | Position d’economiesuisse
- Chapter 1 Les investissements directs étrangers en Suisse constituent-ils une chance ou un risque?
- Chapter 2 De l’importance majeure des investissements directs pour la Suisse
- Chapter 3 Le mythe d’une Suisse sans contrôle des investissements
- Chapter 4 La place d’investissement suisse doit rester ouverte
Le mythe d’une Suisse sans contrôle des investissements
Bien que la Suisse se caractérise – à quelques exceptions près (notamment l’agriculture) – comme une économie très ouverte dotée de conditions-cadre libérales, la situation n’est pas aussi claire en ce qui concerne le site d’investissement. En comparaison internationale, la Suisse a même levé des barrières aux investissements plus élevées que la moyenne OCDE. Alors qu’en Chine ou en Inde, le contrôle des investissements étrangers est encore nettement plus strict, la Suède, le Japon, la Grande-Bretagne et l’Allemagne sont ainsi moins restrictifs que la Suisse.
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La Suisse est déjà plus restrictive à l’égard des investissements étrangers que la moyenne OCDE.
Un examen approfondi montre que notre pays a mis en place davantage de contrôles que la moyenne OCDE et d’autres partenaires commerciaux importants, en particulier dans les domaines de la radio/TV, de l’immobilier et des transports. On ne peut donc pas parler d’une «absence totale de contrôle», comme certains représentants du Parlement le présument (cf. postulat 18.3376).
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Les investissements étrangers en Suisse sont déjà contrôlés.
Concrètement, il existe de nombreuses prescriptions applicables aux investisseurs étrangers en Suisse. Le droit de la concurrence connaît par exemple un contrôle des fusions afin d’éviter la suppression de la concurrence lors de rachats d’entreprises. Le rachat de sociétés cotées est par ailleurs soumis à l’obligation d’annoncer les participations prévue par la législation sur les bourses. La sélection ci-après montre qu’il existe aujourd’hui déjà un grand nombre d’instruments pour protéger efficacement les rapports de propriété des infrastructures et entreprises d’importance systémique.
Réglementationcommunes à plusieurs secteurs
Contrôle des fusions
En Suisse, la protection d’une saine concurrence entre entreprises est garantie en première ligne par le droit de la concurrence et la législation relative au marché unique. La mise en application de la loi est du ressort de la Commission de la concurrence, qui est une autorité fédérale indépendante. Ses tâches principales sont la lutte contre les cartels nuisibles, la surveillance des abus de position dominante, le contrôle des fusions et la prévention des restrictions étatiques à la concurrence et aux échanges économiques intercantonaux.
Devoirs d’annonce
Une société cotée à la Bourse suisse est soumise à la loi fédérale sur la bourse et le commerce de valeurs mobilières, qui comprend également des devoirs d’annonce réguliers. Concrètement, des informations techniques et administratives relatives aux titres cotés et à leurs émetteurs respectifs (c’est-à-dire l’entreprise qui a émis les valeurs mobilières), mais aussi aux titres admis au négoce doivent être mises à disposition en temps voulu et sous la forme appropriée, par exemple en cas de dépassement de limites de droits de vote à la suite de l’augmentation d’une participation. Ces prescriptions sont destinées à garantir un négoce de valeurs mobilières ordonné et fluide..
Loi sur l’expropriation
Le droit d’expropriation peut être exercé – moyennant des indemnisations correspondantes – pour des travaux qui sont dans l’intérêt de la Confédération ou d’une partie considérable du pays, ainsi que pour d’autres buts d’intérêt public reconnus par une loi fédérale.
Approvisionnement du pays
Si notre économie se trouve dans une situation de pénurie grave en termes d’approvisionnement en biens et services vitaux, le Conseil fédéral peut intervenir en édictant des mesures ad hoc (notamment stocks obligatoires, pilotage des prix, expropriation).
Autorégulation
Le droit privé permet à une entreprise de se protéger de manière autonome contre un rachat contre son gré par d’autres sociétés (prise de contrôle hostile). Le droit des sociétés prévoit diverses options statutaires, par exemple la restriction du transfert des actions nominatives, la restriction du droit de vote (limitation du pouvoir de vote d’un actionnaire ou d’un groupe d’actionnaires) ou l’introduction d’actions avec droit de vote (une voix par action indépendamment de sa valeur nominale).
Réglementations spécifiques à un secteur
Outre les règles intersectorielles, des prescriptions de branche spécifiques et la propriété d’État dans de nombreux domaines offrent une protection efficace contre les rachats par des entreprises publiques ou privées étrangères. En même temps, la primauté des forces du marché constitue l’un des principes directeurs de la politique commerciale suisse. Les interventions de l’État ne doivent être que subsidiaires et se limiter aux domaines où elles sont absolument nécessaires.
Secteur financier
La FINMA a pour mission de protéger les investisseurs, les créanciers et les assurés. À cet effet, elle délivre des autorisations aux prestataires financiers en Suisse, assure la surveillance des titulaires de licence (supervision microprudentielle) et prend des mesures à leur encontre au besoin. La Banque nationale suisse veille pour sa part à garantir la stabilité du système financier suisse (supervision macroprudentielle). Pour ce faire, elle peut édicter des prescriptions applicables à l’ensemble du secteur bancaire suisse (en matière de réserves de fonds propres, par exemple). La réglementation et la supervision du marché financier peuvent également inclure la question de l’origine des investisseurs (cf. Marché financier: une réglementation modérée plutôt qu'une réorganisation complète, dossierpolitique).
Immobilier
La «lex Koller» (loi fédérale sur l’acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger) interdit aux étrangers ne résidant pas en Suisse d’acquérir des biens fonciers ou d’investir dans des sociétés immobilières résidentielles. Les participations à hauteur de 33% au maximum ne sont admises qu’en association avec un partenaire local. L’acquisition de terrain à des fins commerciale est en revanche autorisée.
Transports
Les infrastructures sont soit directement aux mains de la Confédération et des cantons (routes), soit aux mains d’entreprises de transport (rail). Les entreprises de transport sont majoritairement des sociétés anonymes de droit public au sens du code des obligations. Du fait de cette situation et des dispositions légales en vigueur (régale du transport de voyageurs), des investissements étrangers ne sont pas prévus dans ce domaine. Seul le trafic de loisirs n’est pas réglementé (réserves de fonds propres, par exemple). Le transport de marchandises par le rail ou la route est soumis à la libre concurrence. Les investissements étrangers dans des entreprises de transport sont donc en principe admis.
Énergie
Les infrastructures stratégiques du secteur énergétique – à savoir les centrales hydrauliques ainsi que les réseaux électriques et de gaz – sont pour la plupart aux mains des pouvoirs publics. S’agissant de l’énergie hydraulique, il est en outre garanti que les centrales hydrauliques n’échappent pas au contrôle des pouvoirs publics sur le long terme et retournent obligatoirement aux communes et aux cantons à la fin de la période d’exploitation de la concession. Une intervention discuté actuellement au Parlement vise cependant à soumettre les infrastructures stratégiques du secteur énergétique à la Lex Koller, ce qui soulèverait des problèmes épineux de délimitation.
Télécommunications
La concurrence est en principe privilégiée dans les secteurs de la téléphonie fixe et mobile. Si 49% des actions Swisscom sont négociables sans restrictions en Bourse, la Confédération garde néanmoins le contrôle avec sa part minoritaire. Les principaux concurrents sont partiellement ou entièrement en mains étrangères. Des restrictions ne s’appliquent qu’aux sociétés de droit public comme les services industriels ou les centrales électriques, qui exploitent aussi des réseaux de fibre optique.
Santé et formation
La surveillance de ces deux domaines incombe en grande partie aux cantons. Dans le domaine des prestations de base, les institutions correspondantes sont majoritairement actives sous la forme d’organisations de droit public et donc protégées contre une prise de contrôle par des investisseurs étrangers. Les institutions privées doivent par ailleurs remplir des obligations légales et des exigences de qualité étendues.
Energie hydraulique
Il n’existe pas de marché concurrentiel, mais la Confédération et les cantons exercent sur les eaux la souveraineté inscrite dans la Constitution (art. 76 Cst.). La plupart des cantons assument leurs tâches au travers des centrales électriques. Certains d’entre eux ont doucement ouvert leur actionnariat, principalement dans le cadre de «partenariats publics-privés» définis de manière précise.
Défense
Le groupe technologique RUAG est organisé sous la forme d’une société anonyme de droit privé. La totalité de ses actions sont toutefois aux mains de l’État, si bien qu’une reprise par des investisseurs étrangers est exclue. La loi sur le renseignement permet par ailleurs au Conseil fédéral d’exercer des activités complémentaires visant à protéger la place industrielle, économique et financière suisse.
Approches réglementaires d’autres pays: libérales à très restrictives
Divers pays se sont dotés de dispositions légales concrètes pour contrôler les investissements étrangers chez eux. Ces réglementations concernent en général les domaines de la sécurité et de l’ordre publics ainsi que les infrastructures d’importance stratégique et les technologies clés. Les prescriptions correspondantes vont de simples devoirs d’annonce imposés à certains secteurs ou de limites de participation, jusqu’à l’approbation obligatoire des investissements étrangers. En général, aucune possibilité de recours n’est prévue en cas de décision négative des autorités. En comparaison internationale, il n’est donc pas possible de brosser un tableau uniforme en matière de contrôle des investissements par l’État. Certains pays, comme la Chine, ont en revanche assoupli certaines règles, alors que d’autres ont introduit des dispositions plus restrictives pour les investisseurs étrangers (les États-Unis, par exemple).
Des considérations ne relevant pas en priorité de la sécurité, mais bien davantage de la politique industrielle ou de visées protectionnistes risquent de jouer un rôle, en particulier en ce qui concerne les infrastructures stratégiques et les technologies, mais pas seulement. La Suisse ne mène à raison pas une politique industrielle interventionniste. En outre, les critères qui justifient de tels contrôles des investissements sont souvent très mal définis et laissent une marge d’interprétation considérable, ce qui peut déstabiliser les entreprises disposées à investir.
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Obstacles politiques aux investissements étrangers très variables au plan international.
Outre les réglementations nationales, des principes et des règles de comportement relatives aux investissements étrangers existent également au niveau multilatéral. Ainsi, le code de l’OCDE de la libéralisation des mouvements de capitaux et les lignes directrices de l’OCDE sur les politiques d’investissement des pays d’accueil relatives à la sécurité nationale contraignent notamment les pays signataires édictant des réglementations en la matière à respecter des principes tels que la transparence, la non discrimination, la proportionnalité et l’obligation de rendre des comptes. Une déclaration de l’OCDE se penche spécifiquement sur les enjeux du contrôle des investisseurs par l'État Les États du G20 ont également formulé en 2016 des lignes directrices concernant les relations avec les investisseurs étrangers. Enfin, l’accord de l’OMC sur le commerce de services interdit dans certains secteurs de discriminer les investisseurs étrangers par rapport aux concurrents nationaux.
Charges administratives considérables pour l’administration et l’économie
Le contrôle des investissements par l’État engendre souvent des charges considérables pour les entreprises et les autorités chargées des contrôles. Les décisions s’opposant à des investissements étrangers sont cependant relativement rares. Une récente évaluation de la CNUCED met en évidence ce déséquilibre entre les charges et les bénéfices: seuls trois investissements sur 737 cas ont été interdits au Canada en 2016 et un seul investissement sur 172 cas a rejeté entre 2016 et 2017 aux États-Unis. Les réglementations envisagées par l’UE engendreraient également d’importantes charges supplémentaires: selon une analyse de Copenhagen Economics, il faudrait à l’avenir contrôler chaque année jusqu’à 1000 cas. Parmi les conséquences attendues, citons des coûts supplémentaires pour l’administration et les entreprises, le report de décisions d’investissement, mais aussi un possible recul des investissements directs.
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Contrôles des investissements par l’État: déséquilibre entre les charges et les bénéfices.