# 5 / 2023
26.06.2023

Évolution démographique: la vague de départs à la retraite ouvre de grandes brèches

Évolution démographique en Suisse et dans le monde

La population de la Suisse vieillit

Comme de nombreux autres pays, la Suisse a touché un dividende démographique ces dernières décennies: la génération du baby-boom, née après la Seconde Guerre mondiale, a progressivement atteint l’âge de travailler à partir du milieu des années 1960. À partir de là, la population active a nettement augmenté. Si davantage de personnes sont en âge de travailler et que beaucoup le font, l’économie dans son ensemble se développe.

À partir de 1965, le taux de natalité annuel a considérablement diminué (c’est ce qu’on appelle l’«effet pilule»). En 1970, la fécondité est tombée à 2,1 enfants par femme, un taux qui permet tout juste de renouveler la population à long terme. Mais depuis le milieu des années 1970, le taux de fécondité est tombé à quelque 1,5 enfant par femme. Ainsi, le nombre de jeunes entrant sur le marché du travail a également diminué à partir de la fin des années 1980. Entre cela et le nombre de personnes âgées qui augmentait grâce à l’allongement de l’espérance de vie, l’âge moyen de la population a crû de manière constante.

La fin du dividende démographique

La croissance de la population active, due au baby-boom, a eu un impact positif sur l’économie dans son ensemble. Mais ce dividende démographique se tarit et l’évolution s’inverse. Les baby-boomers qui ont été si nombreux à entrer sur le marché du travail en sortent désormais. Et comme le taux de natalité est bas depuis longtemps, la relève ne pourra pas compenser ces départs. Cette évolution est observée en Suisse depuis 2020: la population en âge de travailler, hors immigration, diminue de plus en plus.

Les perspectives sont sombres. Le graphique ci-dessous montre que cette évolution négative atteindra son point culminant en 2029: alors, le nombre de personnes qui arrivent à l’âge de la retraite dépassera de plus de 30 000 le nombre de jeunes entrant sur le marché du travail. Au total, cela signifie que, d’ici à 2040, il manquera quelque 431 000 personnes sur le marché du travail. Cela représente 8% environ de l’ensemble de la population active actuelle.

Figure 1: Différence entre les personnes âgées de 65 et 20 ans, par année

Évolutions à l’étranger

La Suisse n’est pas le seul pays à affronter ce défi. Au contraire, toutes les régions du monde, à l’exception de l’Afrique, verront leur population active diminuer ces prochaines années. Cette évolution a déjà commencé dans notre pays, mais aussi dans l’ensemble de l’Europe (cf. figure 2), et l’Amérique du Nord sera également touchée dans quelques années. En Amérique du Sud et en Asie, la population active commencera à diminuer vers le milieu du siècle seulement. En Asie, l’évolution est toutefois différente: la Chine, avec sa très nombreuse population, voit déjà le nombre de personnes en âge de travailler diminuer. Elle connaîtra ainsi une évolution similaire à celle du Japon, en différé. Les changements seront phénoménaux: la population en âge de travailler en Chine passera de quelque 1 milliard de personnes aujourd’hui à quelque 580 millions d’ici à 2100. La seule région où la population active est encore en nette progression est l’Afrique. Aujourd’hui, 40% de la population africaine, soit 540 millions de personnes, sont âgés de moins de 15 ans. Ces personnes chercheront un emploi dans les années à venir, en Afrique ou dans d’autres régions du monde.

Figure 2: Évolution de la population en âge de travailler, hors immigration nette (UN DAES)

Le rôle de l’immigration

Outre le taux de natalité et l’espérance de vie, l’évolution démographique est aussi impactée par l’immigration nette. Si le nombre de personnes en âge de travailler qui immigrent est supérieur à celui des personnes qui émigrent, cela peut contrer la baisse de la population active. Dans le cas contraire, le problème est encore aggravé.

La Suisse bénéficie d’une immigration nette de personnes actives: la majorité de ces immigrants ont entre 20 et 39 ans et ils comblent le besoin de main-d’œuvre (cf. figure 3). Dans ses prévisions démographiques, l’OFS part du principe que, grâce à l’immigration nette, la population active en Suisse continuera d’augmenter ces prochaines années, alors qu’elle diminuerait sans immigration. Ce sera également le cas dans d’autres pays attractifs pour les étrangers en âge de travailler, comme les États-Unis. À l’inverse, le problème s’aggravera dans les pays touchés par une forte émigration de la population active.

Figure 3: Immigration nette par classe d’âge (OFS)