L’in­dus­trie suisse, véri­table poule aux œufs d’or

La Suisse a pris l’ha­bi­tude de cara­co­ler en tête de dif­fé­rents clas­se­ments, allant de l’in­no­va­tion à la com­pé­ti­ti­vité, en pas­sant par la qua­lité de son sys­tème de for­ma­tion, pour ne citer que quelques exemples. Tout cela concourt à notre pros­pé­rité, qui trouve ses racines dans l’in­dus­tria­li­sa­tion. Là aussi, la Suisse se dis­tingue d’autres pays occi­den­taux. Car l’in­dus­trie hel­vé­tique génère encore près d’un cin­quième de la richesse du pays, ce qui est beau­coup pour une éco­no­mie déve­lop­pée. En com­pa­rai­son avec nos voi­sins, seule l’Al­le­magne arrive à une part simi­laire. À la dif­fé­rence près que les salaires y sont net­te­ment plus bas qu’en Suisse.

En règle géné­rale, le déve­lop­pe­ment éco­no­mique d’un pays com­mence par l’in­dus­tria­li­sa­tion. On le voit par exemple en Chine, où la pro­duc­tion indus­trielle s’est très for­te­ment déve­lop­pée au cours des trente der­nières années et où l’em­ploi dans l’agri­cul­ture dimi­nue. Géné­ra­le­ment, plus le déve­lop­pe­ment éco­no­mique d’un pays est fort, plus l’im­por­tance de l’in­dus­trie baisse, car les ser­vices gagnent tou­jours plus en impor­tance.

Là aussi, la Suisse tire son épingle du jeu, puis­qu’elle a su res­ter une nation indus­trielle mal­gré son déve­lop­pe­ment éco­no­mique. L’in­dus­trie y génère près de 20% du PIB, soit envi­ron deux fois plus qu’en France, pour­tant autre­fois grande nation indus­trielle.

Et si le «miracle hel­vé­tique» peut avoir lieu, ce n’est pas grâce à des sub­ven­tions éta­tiques et autres natio­na­li­sa­tions chères à nos voi­sins fran­çais, mais grâce à un solide esprit d’en­tre­prendre, sou­tenu par des condi­tions-cadres à la fois prag­ma­tiques et attrac­tives.

Pour autant, la Suisse aurait bien tort de se repo­ser sur ses lau­riers, car nos entre­pre­neurs constatent chaque jour que les condi­tions-cadres tendent à s’étio­ler de façon lan­ci­nante. Ainsi, les pres­sions pesant sur la voie bila­té­rale avec l’UE ont déjà des consé­quences très concrètes pour la med-tech suisse, du fait de l’ab­sence de mise à jour de l’ac­cord de recon­nais­sance mutuelle (ARM) – tout comme nos cher­cheurs, hautes écoles et PME sont péna­li­sés par la non-asso­cia­tion pleine et entière à Hori­zon Europe.

Dans le même temps, la sur­en­chère de régle­men­ta­tions pèse tou­jours plus sur nos entre­prises. Ces der­nières, notam­ment dans l’in­dus­trie, doivent éga­le­ment faire face à des prix de l’éner­gie éle­vés et à des dif­fi­cul­tés à recru­ter les spé­cia­listes dont elles ont besoin. Et c’est sans comp­ter la nou­velle «mode» du moment, qui consiste à vou­loir leur faire por­ter le finan­ce­ment de tous les pro­jets ou presque auquel le poli­tique a «oublié» de pen­ser en amont.

Pour que l’in­dus­trie puisse conti­nuer de pro­duire en Suisse avec autant de suc­cès et payer des salaires parmi les plus éle­vés au monde, il serait donc bon de veiller à ne pas tuer l’une de nos plus belles «poules aux œufs d’or».

Ce blog a paru dans l'AGEFI le 20 juillet 2024.